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 Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]

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Hayaste Enedwaith

Hayaste Enedwaith


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MessageSujet: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeMer 14 Mai - 17:26

Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  415434Lecombatdescolombes

          Ses yeux se fermèrent lentement sur l’ambre triste de ses iris, marquèrent une pause à l’instant où les paupières ne se rencontrent pas tout à fait ; ses mains tremblaient par moments si épars que l’on eut pu douter de la véracité de ces tremblements. Les sentiments qui l’animaient, en l’absence de paroles, se caractérisaient par une ambiguïté dérangeante. La colère, la tristesse, la détermination, la douleur ? Toutes se lisaient certainement sur son visage, tandis qu’aucune ne se distinguait clairement.

Elle jeta sa tête en arrière, refoulant les larmes et l’humiliation qu’elles représentaient ; l’humidité sur ses yeux vitreux racontait son combat tant physique qu’intérieur. L’air distrait, elle observa les passants qui circulaient dans la petite rue reculée où elle patientait depuis une heure déjà. Ceux-ci marchaient trop vite, se refusaient de perdre ne serait-ce qu’une seconde. Comme si cette seconde était d’une valeur inestimable. Comme si perdre cette seconde signifiait perdre une partie de son être. Comme si perdre cette seconde s’apparentait à une petite mort, un objectif que l’on n’atteint pas, une opportunité que l’on rate.
Or si l’on tient à ne pas perdre les secondes qui nous sont imparties, il est nécessaire d’aller vite, trop vite, de passer dans la rue inaperçu afin d’être à même de tracer sans être détourné de son chemin.
Dans le District 3 tout le monde glisse à la manière d’un voleur, mis à part les soûls.

« Il ne pleut pas sous terre. »

Elle quitta à regret l’ouvrier qui se pressait de changer de rue à pas claudicants et gauches pour fixer son attention sur un visage familier mais sur lequel elle ne savait mettre un nom. Elle mit un certain temps avant de se rappeler le protocole répété, lui semblait-il, des milliards de fois. Puis, avec un flegme calculé, elle se leva, jeta un coup d’œil aux environs afin de s’assurer que personne ne les observait. Une précieuse seconde plus tard, une de celles que l’on considérait plus tôt, une bande de tissu consciencieusement fermée passait d’une poche à une autre. L’homme lui tendit quelques pièces et passa son chemin avec précipitation, à l’image des piétons qu’elle voyait circuler continuellement. Haya fit un câlin à Martin.

A peine disparut-il au coin de la rue qu’elle perdit son assurance feinte pour s’écrouler à nouveau sur le trottoir, emplie d’une poignante lassitude. Elle s’adossa contre le mur rugueux du bâtiment contre lequel elle se trouvait depuis si longtemps que son dos en avait pris la forme. Là, sa tête s’alourdit et s’appuya d’elle-même contre le mur ; le soulagement qui s’ensuivit fut libérateur.

L’ecchymose sur son ventre n’avait cessé de grossir, comme elle put le constater, mais fort heureusement ses clients n’avaient que le loisir d’admirer la griffure saignante qui longeait sa joue. Cette fois-ci, il avait été question du trafic de drogues. Son père était contre. Mais quoi qu’elle fît, son père était automatiquement contre. Il se savait incapable de financer les études de cinq enfants, Hayaste avait entrepris de prendre temporairement en charge la scolarité d’au moins deux de ses frères et sœurs (les aînés) mais rien n’y faisait ; l’illégalité ne plaisait pas à un lâche comme Desch Enedwaith qui ne savait faire face à ses responsabilités paternelles et économiques. Elle cracha par terre tant que sur l’image détestable qu’elle avait de lui.

Un homme s’en vint. Il surgit de nulle part, et sous l’effet de la surprise, Hayaste ouvrit des yeux ébahis. Mais à l’étonnement se mêla bientôt une haine plus profondément enracinée, une jalousie démesurée. Un Aristocrate venait de pénétrer son monde ; la sensation était comparable à la vision d’une souris blanche immaculée parmi une multitude de rats d’égout. Il ressemblait plus à une apparition qu’à une personne réelle tant la qualité de ses vêtements et de son teint jurait avec l’insalubrité des deux districts délaissés par le pouvoir. La haine pour son père, pour son salaire dérisoire se mua en une aversion complète pour la Haute Société et sa vie aisée. Pour cet homme, qui osait sans déguisement fouler de ses pas assurés la misère d’un quartier qu’il niait. Elle se redressa, l’observa sans discrétion.

Il approcha sans se soucier d’elle ; Hayaste ne douta pas un instant qu’il serait plus avisé de le laisser passer sans jamais croiser son chemin à nouveau. Il était de mauvaise augure de franchir le fossé qui séparait leurs deux mondes. Pourquoi ne pas attendre un prochain passant, et accepter un risque moins grand pour une fois ? Elle frapperait d’autant plus fort, calmerait son besoin de violence, et sans la crainte de représailles. Seulement, ce n’était pas ce qu’elle voulait, n’est-ce pas ? Elle avait besoin de plus que cela. Et le dégoût singulier pour cet homme qui lui venait à sa vue était une aubaine à ne pas laisser passer.

* Le pied de chaise lui érafla la joue, elle retint un cri de douleur. *

Hayaste s’extirpa de ses pensées avec une volonté cassante, se mordit la lèvre inférieure. Elle avait fait son choix, sous l’impulsivité certes, mais son choix tout de même. Elle le laissa la dépasser sans lui accorder plus d’intérêt ; il s’éloigna, augmentant ainsi la distance qui les séparait et qu’il venait pourtant de raccourcir. Il le regretterait à l’avenir, ou elle payerait les frais de cette rencontre, mais avoir l’intention de taper sur de l’aristocrate menait rarement à une amitié profonde et subtile. Peut-être s’était-il tout simplement trop approché d’elle pour ne pas provoquer de vagues. Il était en tort, se convainquit-elle. Elle n’était que l’enfant qui tend sa main vers la gueule d’un chien en espérant prouver à sa mère qu’elle se méprend, que les chiens ne mordent pas ; ils en sont incapables.

Elle jaugea son homme du regard ; il n’avait pas l’air des plus robustes. Toutefois, il la dépassait en taille et en prétention, en prestance et peut-être même en tout. Qu’importe, ce n’était qu’une raison de plus pour s’en prendre à lui : elle ressentait le besoin imminent de se défendre contre plus fort qu’elle, et non pas d’abattre ce qui lui était inférieur. Si elle avait été futée, elle aurait renoncé à l’idée de vendre de la drogue ce jour-là au profit d’une séance d’entraînement en solitaire (ou avec Liam, son « acolyte drogue ») ; il n’y avait rien de plus défoulant que de lancer quelques couteaux et à chaque bruit mat de la lame qui s’enfonce dans la paille, imaginer la chair d’un être haï se déchirer.
Mais taper du noble ne serait-il pas plus consolant encore ? L’euphorie la gagna.

* Ses mains se portèrent à son visage pour atténuer la douleur aigüe qui lui piquait la joue comme des milliers d’aiguilles sur sa peau. Dans cet instant de distraction, elle ne put anticiper le deuxième coup au ventre qui la fit se plier en deux. L’espace d’un instant, elle vit par les yeux d’un aveugle, et ressentit la souffrance comme celle, amplifiée, de mille hommes. Puis elle revint à elle-même, ses poumons se dégagèrent et elle reprit une inspiration hachée et hésitante.

« Haya ? fit-il à mi-voix. »

La dite Haya ne l’écoutait plus. Elle palpait son ventre ; elle ne saignait pas. Elle se releva sans mot, et sortit dans l’aube naissante sans un regard en arrière pour le géniteur qui l’appela autant de fois qu’elle l’ignora. Il était rentré dix minutes plus tôt, plus soûl et plus pathétique que jamais ; la situation ne prêtait pas à la discussion.

« Haya excuse-moi ! »

La jeune fille s’en moquait, ne l’écoutait plus, elle était déjà loin ; elle prit une direction au hasard en s’essuyant rageusement le visage. Elle se rappela qu’elle supportait tout cela pour son unique sœur et ses trois frères, et que si cela venait à réellement dégénérer, elle saurait agir en conséquence. Mais de cela elle doutait. Comment être certaine qu’en temps voulu elle se défendrait ?
*

Hayaste emboîta le pas à "sa proie". Ses pas se firent si légers qu’il lui sembla ne plus subir la pesanteur. Elle avait besoin de se battre, de prouver sa valeur, quitte à se faire écraser et risquer de mettre en rogne un fils-à-papa arrogant. Elle adulait le risque, appréciait la situation particulière, et acclamait sa propre bravoure (ainsi que sa stupidité). Peut-être qu’une mauviette des hauts quartiers jugerait incongru de s’en prendre à une fille ? Mais dans cette même optique, elle jugerait également outrageant qu’une fille s’en prenne à sa personne et à son honneur, il pourrait tout aussi bien la maîtriser et s’en plaindre au tribunal. L’issue était incertaine, la multiplicité des scénarios plaisante.

Une poignée de secondes plus tard, toutefois, il dut sentir sa présence car il se retourna. Sans réfléchir, elle l’interpella, comme pour faire le premier pas et dominer, à défaut des péripéties, du moins leur commencement :

« Hey… l’Aristo’ ! »

Les bars étaient encore loin. Très peu de personnes étaient susceptibles de passer par là ; suffisamment pour intervenir en cas de défaite trop violente, mais trop peu pour débuter une rixe générale. Il y avait une raison pour lesquelles celles-ci ne commençaient qu’à l’intérieur d’une auberge ! Il y avait du monde en mal de peine, des rustres hargneux et beaucoup d’alcool, personne ne crachait sur une bonne bagarre. Pour cette même raison elle fuyait avant que tout cela ne dégénère.

« Puis-je ? »

Trop tard pour reculer, elle avait plongé tête la première dans les ennuis, et par nécessité. La question avait sonné presque naturellement dans l’atmosphère paisible de la rue. Sans attendre de réaction, elle se mit en position de combat, courut vers lui et employa toute la force dont elle était capable à lui envoyer son poing dans la figure avant de se remettre en garde.


Dernière édition par Hayaste Enedwaith le Sam 7 Juin - 10:48, édité 3 fois
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Kharlène Pynt
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MessageSujet: Re: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeSam 17 Mai - 10:12

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Gideon Ravenhart

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MessageSujet: Re: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeMar 20 Mai - 14:54

Sa veste noire sur les épaules, Gideon se regardait dans la glace qui ornait le mur de sa chambre. Que pensaient les gens lorsqu'ils le voyaient déambuler dans la rue ? Il tentait de se l'imaginer à chaque fois qu'il croisait son reflet. Pensaient-ils croiser un homme de lettres ? Non, il ne ressemblait ni à un rat de bibliothèque ni à un quelconque chercheur. Pensaient-il plutôt voir un homme dont les poings sont redoutables ? Non pour sûr, sa carrure n'avait rien d’impressionnante. Et il n'inspirait jamais de la peur dans les yeux de ses adversaires. À part lorsqu'il se servait de l'Altération. Mais cela n'était pas visible au premier abord. Il repoussa donc cette seconde hypothèse. Peut-être voyaient-ils en lui un homme à la poigne de fer dans un gant de soie. Oui, cela lui convenait mieux. Les regards qu'il lançait à autrui n'étaient jamais avenants. Il s'amusait juste à toiser les gens de haut en bas. C'était un peu comme s'il les jaugeaient comme il se jauge lui même en ce moment même devant son miroir. Il s'imaginait alors tout le décors dans lequel la personne avait évoluée pour en arriver là. Que c'était-il passé auparavant pour que cette personne, celle-là et non une autre, soit devant ses yeux à ce moment précis. Quels actes avaient façonné sa vie pour qu'elle soit habillé ainsi ? Qu'elle se déplace de tel manière ? Etc. C'était un passe-temps qu'il appréciait beaucoup lorsqu'il déambulait dans les rues de Néo-Utopia. C'était un passe-temps, mais aussi une façon d'échapper aux quelques idées morbides qui lui traversaient trop souvent le cerveau.

Il remit son col en place, fit glisser ses mains sur son pantalon de smoking pour le défroisser, et se regarda une nouvelle fois. Quelque chose n'allait pas. Il passa sa main dans ses cheveux. Oui c'était ça. Il remit en place ses dreadlocks en ajustant ses atébas de laine orange et les quelques fioritures qu'il y avait ajouté. Il sourit à l'adresse de son reflet dans le miroir, parfait.

Il allait sortir lorsqu'il se demanda s'il n'avait rien oublié. Gideon avait souvent la tête dans les nuages. Enfin, la tête dans les nuages, ne devrait on pas dire la tête à la surface en ces temps souterrains ? Il sourit à cette pensée puis commença l'inspection de ses poches. Il tâta la poche intérieure gauche de sa veste et sentit la blague à tabac lovée contre son cœur. Il se promit d'en rouler une en sortant de chez lui, enfin de chez son père. Il plongea ensuite sa main dans sa poche de pantalon pour y sentir le contact froid de son briquet zippo. Il le sortit et joua avec le couvercle un instant. Le son mat du couvercle en métal résonnait dans son crâne à chaque fois qu'il claquait en se refermant. Il trouvait ce son réconfortant. Il l'alluma ensuite, pour vérifier qu'il ne manquait pas d'essence. Enfin il fit une moue réprobatrice lorsque son regard se posa sur son bracelet d'identité. Étais-ce une invention faite pour contrôler ou bien avait-elle été pensé comme un objet pratique ? Gideon se posait souvent cette question, mais il ne se berçait cependant jamais d'illusions quant à la réponse. Il était sûr que ces deux options avaient leur place dans l'esprit imaginatif du créateur de ce bracelet. Et ce monsieur avait su manier habillement ses arguments avec les bonnes personnes pour que le bracelet devienne obligatoire à toute personne foulant le sol de Néo-Utopia.

Une fois son inspection terminée, il sortit de la maison en veillant à claquer la porte avec assez de force pour que son père puisse l'entendre où qu'il soit dans la demeure. Un homme averti en vaut deux, un homme provoqué est toujours plus énervé. Alors que les deux pieds de Gideon venait de claquer leurs talons respectifs contre les pavés de la grande rue, il s'arrêta et commença, comme il se l'était promis, à se rouler une cigarette. Il inspira une grande bouffée de fumée et se demanda alors où est-ce qu'il pourrait bien aller gaspiller le temps de cet après-midi ennuyeuse.

Il éluda rapidement l'hypothèse d'un après-midi dans les quartiers aisés, les gens y étaient d'un ennui mortel. Et son esprit se tourna bien vite vers le troisième district. C'était comme une mauvaise habitude, une sale manie.

Surtout ne t'approches pas du feu, tu vas te brûler ! Mais les flammes sont tellement belles, tellement attirantes, que Gideon ne peut s'en détourner trop longtemps. Sinon il souffre plus que de s'infliger consciemment cette blessure.

Tel un péché exquis de par ses risques, il ne pouvait pas s'en empêcher. Ne pas être à sa place lui procurait une sensation superbe d'adrénaline et de plaisir. Il se sentait comme un explorateur qui découvre une nouvelle civilisation, comme un observateur au milieu d'une bataille. Il était mal à l'aise mais se sentait au mieux de sa forme. Il se sentait en décalage mais totalement en accords avec lui-même. C'était une gourmandise qu'il ne pouvait s'empêcher de croquer à pleine dents. C'était un désir puissant qu'il ne pouvait refréner.

Il aimait s'imaginer être le mouton noir du troupeau que personne n'aime mais qui finalement, fait partie intégrante du fonctionnement de ce même troupeau. Tel un souffre-douleur, il se devait d'exister pour que le groupe persiste. Et même si ce n'était pas le cas, il se plaisait à se le répéter.

Enfin Gideon arrivait dans le troisième quartier. Il mit donc ses gants comme à son habitude, d'abord le droit, lentement, puis le gauche, d'un geste vif. Il se demanda où il pouvait donc bien aller. La menuaille n'avait pas finie du travailler, il était donc inutile de se rendre à la sortie d'une quelconque usine. Il n'y aurait aucune animation à cette heure de la journée. De plus, les bars étaient encore vide. Pourquoi était-il venu ici en pleine après-midi ? Il ne le savait pas lui-même. Il fallait qu'il trouve quelque chose à faire. N'importe quoi, mais quelque chose qui l’amènerait à se sentir vivant une fois de plus. Alors qu'il perdait tout espoir de trouver une occupation qui lui plairait, il pensa à un quartier qu'il n'avait foulé de ses pas depuis maintenant plusieurs semaines. Oui, la solution à son ennui était là, juste devant ses yeux. Il allait se rendre dans ce quartier glauque qui abritait dealers en tout genre. Il se souvint du temps où il y allait pour satisfaire les désirs des femmes qu'il fréquentait. Il allait leur chercher un peu de substance psychotrope, et ils passaient alors la nuit à se shooter tout en faisant l'amour. Il eu un sourire en repensant à la fois où il s’était fait courser par quelques hommes drogués jusqu'aux os parce qu'il n'avait pas payé sa dope. Cette course-poursuite lui avait procuré une sublime dose d'adrénaline qui avait atteint toutes les infimes parcelles de son cerveau. Mais il coupa court à ses souvenirs et se dit qu'il prendrait peut-être quelque chose pour lui, histoire de planer un instant en dehors de la vie obscure des cavernes. Il oublierait son bras qui le faisait encore souffrir lorsqu'il le bougeait. Et surtout, il se sentirait bien d'être quelques heures déphasé du monde auquel il appartenait.

C'était décidé, il n'était pas loin de ces ruelles sombres aux allures peu avenantes, et l'adrénaline lui montait au crâne rien qu'à penser à son excursion dans ce milieu hostile. Il décida de s'allumer une cigarette, cela le ferait patienter jusqu'à ce qu'il arrive en ce lieu dangereux.

Enfin il s'approchait du quartier des rêves, comme on l'appelait. Le timing était parfait, il venait tout juste de tirer la dernière bouffée de sa cigarette. Il la jeta nonchalamment au loin et tourna dans une ruelle qui marquait une des entrées du quartier des rêves. Les entrées étaient facilement détectables, un graffiti avait été apposé sur chacun des murs. Il représentait une pilule entrouverte qui déverse son contenu, c'est-à-dire des champignons de toutes les couleurs. Gideon fit un léger signe de main au niveau de son front pour saluer ce vieil ami muet. Content de te revoir, murmura-t-il à lui-même. Il se tourna ensuite face à la ruelle, fit craquer ses doigts ensembles, et s'engagea dans ce labyrinthe de pan.

Si Gideon se souvenait bien, il lui suffisait de tourner à droite, puis de prendre à gauche pour aller voir ce dealer un peu taré qu'il appréciait. Il ne l’appréciait pas en tant qu'ami ou même en tant que personne. Mais il raffolait de ses tocs compulsifs et farfelus, ainsi que de ses délires paranoïaques. Pour Gideon, il était amusant. Il se moquait de lui, comme un enfant mal-aimé apprécie se moquer des plus démunis que lui. Encore plus drôle, les menaces que Gideon pouvait proférer à son égard ne lui faisait aucun effet. Il répondait juste par « Je le savais, tu me veux du mal, je le savais. Mais qui ne me veut pas de mal ici ? Alors, tu achètes quelque chose ou pas, l'Aristo' ? ». Tout cela faisait sourire Gideon, et il lâchait parfois un rire lorsque le dealer fou répondait totalement à côté de la plaque.

Il prit donc la première ruelle à droite, avançant gaiement, tel un enfant qui part acheter une friandise après avoir reçu un peu d'argent. Gideon croisa une jeune femme qu'il ne prit même pas la peine de dévisager, il était bien trop occupé par sa volonté de rencontrer à nouveau cet homme à l'esprit dérangé. Plus que quelques pas, et il tournerait à gauche pour enfin apercevoir la gueule cassée de l'homme à la consommation abusive de substances.

Les divagations de Gideon se stoppèrent d'un coup, et son esprit fit un tour complet dans son cerveau. On le suivait. On peut dire qu'il avait l'habitude de ce genre de comportement. Un jeune homme aisé dans les bas quartier attise toujours la convoitise d'autrui. Mais jamais il ne s'était fait prendre par quelques malandrins qui voulaient le détrousser. Ils étaient trop peu discret, et un peu trop abrutis. Mais il était étonné, il n'avait pas remarqué plus tôt cette filature. Son poursuivant était agile, pour sûr.

Il se retourna, brusquement. Il était souvent efficace, pour faire battre en retraite ces dégénérés, de leur montrer que l'on savait qu'ils nous suivaient.

« Hey... l'Aristo' ! »

Gideon toisât du regard celle qui importunait le déroulement de sa marche jusqu'à son plaisir malsain. Une femme, assez petite, se tenait en face de lui. Elle n'était pas si moche pour une femme des bas quartiers. Mais elle portait, comme tous ses congénères, des guenilles que Gideon trouvait dégoûtantes. Était-ce une femme de joie qui voulait se faire plus d'argent en emmenant dans son lit autre chose qu'un clampin puant la sueur ?

« Puis-je ? »

La malpropre, n'attendant même pas de réponse, courut vers Gideon. Il fut surpris, vraiment surpris. Comment une femme de ce gabarit pouvait-elle penser avoir une chance contre lui ? Plus que surpris, il était surtout vexé. Il savait qu'il n'était pas bien impressionnant. Mais tout de même, cela allait trop loin.

Il esquiva le coup de poing qui se dirigeait vers son visage. C'était trop prévisible, beaucoup trop. Et elle finit son mouvement agressif dans le vide, à un mètre de Gideon. Par précaution, il avait effectué un pas en arrière lorsqu'elle l'avait dépassé. Malgré cet échec cuisant, Gideon n'eut pas l'impression qu'elle allait baisser les bras. Et il vit juste, elle se retourna en un éclair de secondes, et se remit en position de combat.

« Que t'arrive-t-il, pauvre femme à l'esprit dérangé ? Tu es dans un mauvais trip ? Papa ne t'a pas dit que la drogue, c'est mauvais ? Rentres donc chez toi et vas te cacher sous les jupes de ta mère, pauvre enfant. »

Gideon vit comme un excès de rage se dessiner sur les traits de la jeune femme. Il n'eut pas le temps de confirmer son hypothèse, et reçut un violent coup de pied en plein dans le perroné. Outch, qu'est-ce que ça faisait mal ! Il para une autre attaque en direction de son menton grâce à un réflexe qui tombait à pic, puis fit deux pas en arrière pour masser l'arrière de sa jambe.

« Mais tu es folle bordel ! Sale rejeton consanguin. Tu sais ce que tu viens de faire à l'instant ? Tu viens de t'accorder le droit d'avoir mal. Je vais te renvoyer dans ton cloaque infâme espèce de pute en chaleur. »

Gideon se redressa et brandit ses poings devant son visage. Il fit deux pas rapides, souvenir d'une boxe que lui avait appris son précepteur, vers la jeune femme. Il entama un mouvement de son bras droit mais le stoppa net à quelques centimètres du bras protecteur que la jeune femme avait dressé entre son visage et la main de Gideon pour alors mettre une puissante gifle de la main gauche. Du fait de la surprise, la jeune femme perdit l'équilibre et recula de quelques pas. Gideon eut, quant à lui, un rictus de douleur. Il avait dû forcer sur son bras droit pour que l'attaque semble vrai. Et il payait maintenant le contre-coup de ce mouvement vif.
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Pranan
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MessageSujet: Re: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeMar 20 Mai - 23:03

Le charisme de Gideon, ainsi que son goût pour le danger sont récompensés par 140 points d'expérience!
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Kharlène Pynt
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MessageSujet: Re: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeMer 21 Mai - 15:25

Le combat est arbitré dans le topic ci-dessous:

Hayaste vs Gidéon


Dernière édition par Kharlène Pynt le Mer 28 Mai - 14:36, édité 1 fois
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Hayaste Enedwaith

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MessageSujet: Re: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeSam 24 Mai - 23:42

Son poing traversa le vide, à l’emplacement exact où l’homme se trouvait une fraction de secondes auparavant. Il était d’une rapidité impressionnante, mais Haya ne se laissa pas déconcerter. Elle se remit aussitôt en garde, prête à enclencher un prochain assaut. Son regard exhalait une détermination farouche, presque bestiale. On eût dit une gazelle défendant sa peau face à un lion rugissant. A la différence qu’en l’occurrence, c’était la proie qui avait provoqué le prédateur. Le combat serait rude, mais qu’est-ce qu’elle risquait de plus qu’avec son père ? Absolument rien. Le seul changement notable la concernant consistait en la possibilité de frapper, se venger, riposter. Des notions jusqu’alors inexplorées.
« Se blesser » lui sembla dérisoire, si « faire mal » lui était accordé.

Les insultes aristocratiques fusèrent, inévitables, entre une ou deux questions rhétoriques visant ouvertement à l’humilier, la vexer sans doute, annoncer le commencement d’une joute verbale très certainement. Une courte seconde, elle leva les yeux au ciel, inspira profondément pour calmer son aversion envers la noblesse beau-parleur et ses conventions à la lâcheté évidente. Elle désirait un duel physique, pas oral, n’avait-elle pas exprimé cette envie assez clairement ?
Les mots de son adversaire furent cependant plus tranchants qu’elle ne l’avait anticipé, et le choc fut terrible. Les émotions négatives qui la submergèrent lui dictèrent son prochain mouvement. Alors qu’il terminait sa dernière assertion, le coup de pied partit, et elle mit toute la force dont elle était capable dans ce simple geste et sournois. Cette fois-ci, emporté dans sa tirade, il ne réagit pas à temps, et Hayaste décrocha sa première victoire.

« Pas besoin de drogues pour que l’envie de te frapper ne me vienne. »

Elle aurait espéré qu’il avait appris la leçon, qu’à présent il ne ferait que frapper, mais les insultes repartirent de plus belle. L’énervement monta en elle, alors qu’un aristocrate qui pouvait seulement se vanter d’être bien né se mesurait à elle, son passé, son présent, et allait même jusqu’à la menacer de lui accorder le droit de souffrir. Comme c’était attendrissant ! Accessoirement, il la traita de manière plutôt raffinée et légère de fille de joie en période de menstruations. Chaque parole qu’il prononçait l’insupportait, chaque mot la blessait et ajoutait à sa colère.

« Tais-toi et agis ! »

Hayaste ne fut pas déçue. Cette fois-ci, le noble maniéré passa à l’attaque. Ce fut plus humiliant que douloureux. Sa fierté prit un coup, tandis que sa joue cuisait vaguement suite à la baffe qu’il lui avait administrée. Cela faisait des lustres qu’elle n’avait pas été giflée, et la sensation était des plus désagréables, car évocatrices de mauvaises disputes tant avec son père qu’avec sa mère. Ce noble avait-il décidé de lui jeter au visage toutes les épreuves de sa vie ? Impitoyable par le choix de ses mots et de ses actions, il la laissait plus accablée que satisfaite. Dès la première seconde, il avait eu le don de s’attirer son antipathie, mais son dégoût pour lui allait au-delà de toutes ses espérances.
Trop absorbée qu’elle était par le coup sa fierté venait de subir, elle ne remarqua guère la grimace de Gideon alors qu’il frottait son bras droit. Elle aurait pu s’en servir comme point faible, mais Hayaste n’était pas, il fallait se rendre à l’évidence, une bonne observatrice. Elle manquait de plus d’une certaine raison, d’une cohérence dans ses actes et d’une réflexion dans ses choix. Tout cela combiné donnait une jeune Tarkin fougueuse et irrationnelle. Une jeune Tarkin qui en voulait encore.

Elle se refusa donc à converser plus. La frustration la gagnait, et s’amplifia largement lorsque son adversaire se déroba à son coup de poing. Il tenta de lui renvoyer la pareille mais elle fut suffisamment alerte pour éviter à son tour son attaque. Elle soupira d’exaspération. Comment empêcher le combat d’adopter un tournant si ennuyeux ? Elle était capable de se battre contre du vent sans la présence d’aristocrate médisant ! Ne pouvait-il tout simplement se plier à ses désirs ?

Elle tenta la feinte, perça sa défense. A sa plus grande joie, il répondit par un coup de poing dans le ventre bien placé. Elle se plia en deux l’espace d’une seconde, avant qu’un coude malvenu lui arrache littéralement la mâchoire. Elle recula d’un pas hésitant. L’euphorie coulait dans ses veines, là où la colère s’estompait. Elle ne ressentait plus rien à l’encontre de Gideon, seule une soif de violence qui la taraudait et demandait satisfaction. La jeune femme envisagea l’espace d’un instant sortir son couteau, mais se refusa cette lâcheté. Elle-même voulait un combat au talent, et dont l’issue ne serait pas déterminée par l’équipement.
Elle en appela plutôt à la puissance grondante qui sommeillait en elle. L’Altération s’assembla, fit de son poids celui d’une plume, et de sa force celle d’un tigre. Son pied fut guidé par la magie elle-même lorsqu’elle lui asséna un coup de pied dévastateur et qu’il s’envola pendant, lui sembla-t-il, une éternité. Son adversaire s’écroula plus loin. Il se releva tant bien que mal, plus furieux que jamais, et peut-être un peu déstabilisé par la fourberie de son attaque.

« Une utilisatrice de l'Altération ? C'est bien ma veine de tomber sur une chienne dégénérée mise en cloque par un démon. Toujours des emmerdes, encore des emmerdes. Tu ne veux pas plutôt aller régaler tes amis avec ton pouvoir ? Leur faire un petit spectacle ? J'ai à faire, alors hors de ma route, bête de foire. »

L’homme en noir, encore une fois, brisait le rythme de leur danse, pour se perdre en dialogues inutiles. Plus énervé que déstabilisé par son intervention magique, il persévérait dans sa stratégie de conversation venimeuse et ponctuée de piques que l’expérience et l’habitude semblaient avoir peaufinés plusieurs années durant. Piques inopportunes qui, à son plus grand regret, trouvaient son chemin jusqu’à sa conscience, et s’installaient confortablement dans sa mémoire afin d’y demeurer un temps encore indéfini. Elle se fit violence pour repousser la rage qui cherchait à annihiler ses sens.

« Qu’est-ce que ça parle un Aristocrate ! se plaignit-elle, désinvolte. »

A nouveau, elle chercha le contact, mais le noble esquivait plus qu’il ne s’appliquait à lui mettre sa raclée. Elle utilisa l’altération derechef pour mettre un peu de piment dans cette bataille avortée dans l’œuf par le manque de réceptivité de son adversaire. Un petit effort, c’est tout ce qu’elle demandait !
Timidement, Gideon employa à son tour l’Altération, à la plus grande surprise de la jeune fille, qui se laissa surprendre par l’attaque comme une novice en la matière. Elle le regarda intensément, comme si elle voyait un Altérateur pour la première fois, et un sourire se devina presque à la commissure de ses lèvres. A son étonnement visible se mêla un plaisir pervers, puisqu’il accepta enfin de riposter. Suite à son recours à la magie, ses coups devinrent plus nombreux, plus précis, plus douloureux. Malgré tout Hayaste parvenait à lui en renvoyer certains, et ces exploits rassuraient sa fierté, stimulaient son investissement dans les coups qu’elle assénait, confortaient sa détermination. Le combat, le vrai, débuta alors.

Emportée par la folie du combat à main nue, elle en oublia son environnement, son adversaire, elle s’oublia elle-même pour ne plus qu’être ce qu’elle faisait. Elle plongea sans réfléchir dans l’agressivité persistante, que seule la fatalité ne peut arrêter.
Le combat ne cesserait pas par forfait !

Toutefois, ce qu’elle n’avait pu prévoir, c’était le mécontentement extrême de l’Aristocrate. A l’inverse d’Hayaste, il ne prenait pas plus de plaisir que cela à la frapper. Son plaisir allait decrescendo. Plus le temps s’écoulait, plus sa patience s’amenuisait. Ce jeu lui faisait perdre ses précieuses secondes, lui qui ne rêvait que de drogues et autres plaisirs concrets. De surcroit, l’adolescente menait le duel depuis trop longtemps déjà, et l’appel des produits illicites lui était plus réconfortant que les agissements imbéciles d’une manante rencontrée au détour d’une rue. Hayaste, au plus haut de son extatique ivresse, reçut un coup de pied salutaire, doublé par un deuxième qui lui coupa la respiration.

Hayaste inspira. Souffrance. Elle expira. Douleur.
Une seconde s’écoula, brève et portée par une brise glaciale, puis s’évanouit au loin.

Hayaste atterrit lourdement sur le sol, plusieurs mètres plus loin. Le choc entre le trottoir et son dos fut bien moins brutal que l’instant où le pied du noble avait frappé sa cible. Sa tête avait probablement cogné le sol, car des nuances de blancs obstruaient sa vue par intermittence. Mais de toutes ses sensations, seules importaient la blessure lancinante sur son abdomen et une autre, moins diffuse mais en un sens plus aigüe, qui remontait de sa jambe. Dans sa torpeur, elle s’employa à éclaircir sa vision afin de constater son état et prévenir une nouvelle attaque surprise ; mais elle échoua pitoyablement. Sa volonté n’y fit rien, elle ne pouvait que lutter contre l’inconscience. L’évanouissement lui tendit les bras avec fraternité, comme une promesse de réconfort mérité, mais l’expression de sa lâcheté affecterait trop son orgueil.

La jeune Tarkin puisa plutôt dans des ressources inconnues jusqu’alors pour rouler sur le côté afin de relâcher la tension sur son ventre et atténuer son mal. Elle alla de Charybde en Scylla, soulagea momentanément son ventre mais décupla la douleur qui lui transcendait la partie inférieure de la jambe gauche. Elle gémit, à la manière d’un petit mammifère sans défense que l’on égorge sans vergogne. Elle s’arrêta dans son mouvement, les mains pressées contre elles, elle murmura une insulte que j’aurais la décence de ne pas partager.

Hayaste avait trouvé quelqu’un qui frappait plus fort que son père, elle avait rencontré pour la première fois une personne qui méritât plus sa haine que son propre géniteur, et en cela elle était vainqueur.
Mais de cette victoire, elle ne tirait nul repos, seulement un état de faiblesse déplorable, et une avanie regrettable. Il s’était non seulement acharné à la briser moralement, mais l’avait également achevée physiquement. Plus jamais, pensa-t-elle amèrement, et sans doute elle-même n’aurait su dire ce qu’elle ne ferait plus jamais.

« Crève, enflure, murmura-t-elle sans conviction. »
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Gideon Ravenhart

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MessageSujet: Re: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeMer 28 Mai - 0:25

Cette jeune femme, elle possédait elle aussi l'Altération. Et elle l'utilisait avec moins de retenue que Gideon. Qu'elle folie s'était emparée de son esprit ? Lui qui se sentait comme un mort en sursis osait avec peine avancer d'un nouveau pas sur ce chemin sans retour possible. Pourtant, il en avait fait des conneries. Des nuits entière à se droguer, à boire et à finir dans le caniveau, la tête et le corps fracassés. Il ne pouvait tenir le compte de ses déboires destructeurs., ils n'avaient été que trop nombreux. Et elle, apparemment sous prétexte qu'elle haïssait plus que tout au monde les aristocrates, avait ouvert les verrous de son pouvoir pour le laisser se déverser dans ses veines et son cerveau. Gideon se sentait stupide et pitoyable. Avait-il peur finalement ? Avait-il peur de ce démon qui rampait irrémédiablement sous sa peau ? Lui ? L'homme en noir qui jouait avec sa propre mort dans une danse funeste ? Était-il finalement le seul à danser sur la musique lugubre de son existence ? La mort l'avait-elle seulement frôlée au moins une fois ? Oui, bien sûr, une fois, cette fois-là. Le jour où il avait perdu celle pour qui il avait tant d'admiration et d'amour. Il la revit un instant dans son esprit, cette femme. Cette femme qui le tenait de ses bras rassurants en lui racontant des histoires sur la surface. Mère... Un larme perla sous son œil. Mais il l’effaça bien vite pour revenir à des pensées plus terre à terre.

La jeune femme qui l'avait agressé se tenait au sol, gémissant de douleur. Il songea un instant la laisser là, la laisser mûrir ses pensées quant à agresser un aristocrate dès qu'elle en voyait un. Ce n'était pas sans danger, surtout s'il avait été un fils à papa plutôt qu'un homme en recherche d'adrénaline. Elle aurait pu se retrouver condamnée et peut-être exécutée pour cette folle attaque. Qu'avait-elle cherché à prouver ? Était-ce sa position dans cette société inégalitaire qui l'avait poussé à ce violent acharnement ? Gideon était curieux. Et ce bout de femme l'interpellait énormément. Elle l'avait poussé dans ses retranchements. Il avait été acculé l'espace d'un instant. Une femme, provenant du plus bas de l'échelle sociale, avait mis en défaut sa fierté et son assurance lors d'un duel. Il n'avait aucun mal à accepter ses nombreuses défaites, il ne pouvait strictement rien faire contre une foule d'hommes alcoolisés et en colère. Le nombre le faisait plier tel le vent fait plier l'arbre sous ses rafales incessantes.

Le vent, le sentirait-il seulement une fois dans ses cheveux ? Le sentirait-il glisser au moins une fois sur son visage de sa froide et frêle caresse ? Il ne pouvait que l'espérer. Mais plus que le vent, il voulait sentir la pluie sur son corps brûlant de l'intérieur, rongé par le démon, rongé par la tristesse, rongé par la violence. Il laverait ses doutes d'une douche naturelle. Il irait courir, nu comme un ver, sous cette eau tombant du ciel. Il se sentirait vivant, et honorerait la mémoire de sa mère défunte. Il irait courir pour lui comme pour sa mère qui rêvait de retourner à la surface. Une fois, une seule fois lui suffirait à assouvir ce désir qui lui semblait inaccessible. Une fois, une seule fois lui suffirait à laver sa culpabilité de n'avoir pu amener sa mère à la surface avant qu'elle ne le quitte définitivement.

Mais il s'écartait encore de la réalité, plongeant à nouveau dans ses pensées qui sans cesse l'assaillaient. Il écarta le visage de sa mère pour le ranger dans ses souvenirs et reprit pied dans la sombre ruelle où la femme gisait.

Elle n'était pas inconsciente, preuve remarquable de son courage ainsi que de sa détermination. Gideon commençait presque à l'admirer pour sa force de caractère. Une petite femme menue qui cachait bien son esprit de lionne aux griffes acérées. Elle l'avait blessé, elle avait lanciné sa peau et son assurance de coups violents. Mais, bizarrement, il n'était pas en colère. Non, il était plutôt surpris et, ma foi, bien curieux. Pour la première fois de sa courte vie tortueuse, quelque chose retenait toute son attention. Une lueur dans les sombres cavernes avait attiré ses yeux, les amenant à s'ouvrir d'avantage. Il se sentait comme un mineur qui venait de découvrir un filon. Elle l'intéressait énormément. Une femme, détentrice de l'Altération, vivant dans les bas quartiers et donc absoute de tout formatage sociétal que subissait les nobles, venait de heurter sa vie étrange. Et il ne voulait pas laisser passer une telle occasion. Il en était hors de question. Ç’aurait été un sacrilège que de ne pas chercher à en savoir plus.

Mais voudra-t-elle lui parler ? Après tout il venait de lui faire très mal, que ce soit physiquement, ou mentalement. Il ne doutait pas que cette défaite devait peser sur l'esprit intriguant de cette jeune femme. Et puis, la gentillesse et l'amabilité n'était en aucun cas ses points forts. Il était avant tout exécrable et tenait la plupart du temps des propos acerbes. Les rares fois où il n'agressait pas autrui de ses paroles, c'était lorsqu'il commençait à être alcoolisé ou lorsqu'il voulait découvrir une femme dans ses moindres « recoins ». Mais il se devait d'essayer. Aussi mal c'était passé leur rencontre, il voulait connaître les tenants et les aboutissants de l'esprit de cette femme. Qu'est-ce qui motivait sa soif de violence ? Pourquoi se trouvait-elle dans ce quartier ? Était-elle une consommatrice de produits ? Quelles haine vouait-elle aux nobles ? Était-ce par pur ressenti ? Ou bien cela allait-il plus loin ? Et la question, de loin la plus capitale aux yeux de Gideon, faisait référence à ses pouvoirs et à son utilisation démesurée par la jeune femme.

Hayaste – Crèves, ordure.

Aussi faible fut ce murmure, il résonna aux tympans de Gideon comme une réponse claire à ses interrogations. Ce n'était pas gagné, pensa-t-il alors. Comment faire pour qu'elle change d'opinion le concernant. Il avait assené sans retenu des insultes plus fleuries les unes que les autres, et il venait de la clouer au sol, littéralement. Et puis surtout, elle n'avait pas totalement tort, il était tout de même une sacrée enflure. Pourquoi se scinder la tête en quatre, il avait la réponse à une de ses grandes questions : comment autrui le percevait. Il n'en fut pas dérangé plus que cela, mais cela contrariait tout de même ses plans quant à la jeune femme. Son cerveau n'arrivait pas à penser rationnellement pour trouver une solution, son esprit lui renvoyait sans cesse ces deux petits mots qu'elle venait de prononcer.

Il l'observa alors plus minutieusement. La femme devait être d'un âge proche du sien. Elle avait un minois somme toute assez joli, même si en ce moment la souffrance se lisait sur les traits de son visage. Elle était habillé d'une manière plutôt ordinaire pour les gens des bas quartiers. L’œil de Gideon fut tout de même attiré par un petit manche qui dépassait de sa veste ouverte. Un couteau ? Cette femme était vraiment étonnante. Elle avait sur elle une arme capable de blesser gravement ou de tuer quelqu'un et elle ne s'en était pas servie de tout le combat. Que lui voulait-elle donc ? Le mystère s'épaississait au fur et à mesure que la curiosité de Giedon grandissait. Cette découverte le motiva tellement qu'il se refusa clairement et simplement à abandonner l'idée d'en apprendre plus sur cette femme. Il étudia alors plus attentivement où se portaient ses mains. Il avait entendu sa jambe émettre un craquement sonore lors de l'impact, et il constata qu'effectivement ses mains soutenaient sa jambe douloureuse. Elle était sûrement cassée vu la violence dans laquelle Gideon avait plongé alors qu'il avait vu l'issu du combat basculer en sa défaveur. Les hommes et leur fierté, il sourit intérieurement à l’évocation de ce pléonasme.

Elle était donc assez gravement blessée pour ne pas être en capacité de rentrer chez elle, ou du moins elle le ferait avec grande difficulté. L'idée lui vint tout naturellement à la suite de cette constatation. Il fallait trouver un moyen pour qu'elle accepte qu'il l'amène chez Rodriguez, un médecin « improvisé » du coin, puis chez elle. Mais pour la convaincre, il allait avoir besoin de tous ses bons mots. Oui, il fallait la brosser dans le sens du poil. Mais sans trop exagérer ou bien elle le renverrait paître. Il ne fallait pas qu'il use de trop de politesse, elle se sentirait sans doute rabaissée. Il ne fallait pas non plus tomber dans la condescendance, son orgueil prendrait une blessure difficilement soignable, sûrement plus douloureuse que celle à sa jambe si l'adversaire qu'elle avait défié la plaignait ensuite. Cependant il fallait que Gideon arrive à l'amener avec lui. Il ne le fallait pas non, il le devait. Cet événement avait éveillé en lui une soif de savoir que seule cette femme pouvait étancher. Et jamais il ne se le pardonnerait de ne pas avoir eu les réponses à ses questions.

La jeune femme gémissa de douleur lorsqu'elle fit mine d'essayer de changer de position. Ce qui ramena Gideon dans la froide ruelle. Combien de temps avait-il été perdu dans ses pensées ? Il ne le savait pas. Mais ce retour à la réalité ne voulait dire qu'une chose, il devait passer à l'action. Il savait manier les mots, et il espérait de toute son âme que ces années à affûter sa repartie seraient suffisantes. Il s'assit alors sur une caisse en bois à un mètre de la femme allongée sur les pavés. Il sortit sa blague à tabac brune et roula une cigarette qu'il posa sur son oreille. Il en roula ensuite une seconde qu'il garda en main.

Gideon – T'as de sacrés crocs pour une femme de ton gabarit tu sais. Ils ont bien failli se planter irrémédiablement sous ma peau pour me faire fermer ma grande gueule. Mais on ne t'avait jamais dit que les beaux-parleurs ont la peau dure ?

À la vue de son expression faciale, Gideon comprit que le moment d'essayer de faire des blagues n'était pas encore venu, pour sûr non.

Gideon – Trop tôt pour tenter une blague, j'ai saisi. Mais tiens, prends cette clope. Et c'est pas par charité, je suis pas ce genre de gars. C'est juste que je fume tout le temps tout seul, et c'est saoulant à la longue.

Il tendit la main qui contenait la cigarette vers la jeune femme. Il n'arrivait pas à décrire son expression. Il était sûr qu'elle était surprise, mais un autre sentiment se mêlait à celui de l'étonnement. Impossible de mettre le doigt dessus. Il oscillait, selon Gideon, entre la haine, le découragement et une pointe presque imperceptible de renoncement.

Gideon – Je vais pas te mordre. Prends-là ou je la jette dans cette putain de flaque d'eau. Grouilles.

Elle prit la cigarette, toujours silencieuse, et sans manquer de lui balancer un regard acide. Elle porta la cigarette à ses lèvres et fit une moue alors que son mouvement venait de lancer une douleur dans son abdomen. Gideon sourit à demi, d'un sourire assez faible pour ne pas être vu par quiconque. Il venait de faire un premier pas vers son objectif. Il pris alors la cigarette qui reposait sur son oreille pour l'allumer. Son visage se crispa à son tour. Elle avait sérieusement amoché le beau-parleur à la peau dure pensa-t-il. Il tira une bouffée, une bouffée longue et enivrante, de celles qui vous montent au crâne et libèrent une vague de plaisir dans votre tête. Puis il tendit la main dans laquelle se tenait son briquet, de la même façon qu'il avait proposé la cigarette quelques instants plus tôt. Il la regarda allumer sa clope avec difficulté, mais il ne devait pas essayer de l'allumer lui-même. Elle l'aurait ressenti comme une insulte. Ces cours de psychologie ne lui avaient pas servi à rien, finalement.

Ils fumèrent leur cigarettes en silence sur plusieurs bouffées. Puis Gideon se dit qu'il était temps de remplir cet espace vide de paroles.

Gideon – Je suis peut-être un Aristo bavard, mais putain t'es une ouvrière bien muette. Sans vouloir t'offenser bien sûr.

Hayaste -  Parce que je ne dis pas ce qui est inutile. Ça s’appelle ne pas être superficiel.

Hum elle avait de la répartie la bougre, même alors qu'elle était à moitié morte. Gideon ne nota aucun changement dans le comportement de la jeune femme, elle se contentait de consumer sa clope et le regardant avec une rancœur palpable. Il décida donc de parler, espérant percer le blindage de la jeune femme. Pour cela il avait eu une idée : parler de lui. Ce n'était peut-être pas la meilleure des idées, mais il avait le souvenir d'un cours sur les liens que l'ont peut créer avec autrui. Et ceux-ci passaient par un échange d'informations des deux côtés. Dans cette optique, parler de lui lui avait paru être la meilleure solution, et ainsi, il pousserait peut-être la femme à lui adresser la parole.

Gideon – Bon du coup, ça m'ennuie un peu tu t'en doutes, mais je vais devoir faire la conversation. Tout d'abord, est-ce que t'avais déjà rencontré un autre détenteur de l'Altération ? Bordel j'ai été scié, clairement ! Tu m'as vraiment surpris, et je peux te dire que c'est un exploit ! Il n'y a plus grand chose qui me surprenne dans ces foutus grottes. Ou peut-être les femmes qui m'agressent dans le quartier des rêves, mais ça ne m'arrive pas souvent, et puis, c'est une autre histoire.

La jeune femme le regardait à présent d'un air désabusé. On aurait dit qu'elle venait d'entendre la tirade la plus pitoyable de l'homme le plus étrange au monde. Gideon détesta instantanément ce regard, mais il ravala sa colère tout aussi promptement. Après tout, son regard avait changé, et c'était encourageant. Il fallait continuer à parler, et au passage essayer de placer un compliment discret sans pour autant dévier du sujet.

Gideon – Mais, trêve de plaisanteries, je suis vraiment impressionné que tu maîtrises l'Altération, que tu ais failli m'exploser la tronche, et tout et tout... Mais putain ce qui m'a vraiment surpris c'est que tu utilises cette foutue magie d'une façon encore moins réfléchie que moi. Et je suis pourtant un sacré con, et ça, tu peux me croire. Tu m'as roué de coups avec ce pouvoir comme s'il ne comportait aucuns risques. Je suis sur le cul, bordel que oui je le suis ! Moi-même je dois bien avouer ne pas l'avoir utilisé à bon escient, mais de là à agresser un type dans la rue avec ce don à double tranchant, chapeau ! Enfin... Je dis un type mais t'avais sûrement une bonne raison de m'agresser. Pour une fois que ce n'est pas à moi de donner une raison aux gens de se battre contre moi, je devrais m'estimer heureux.

La cigarette de Gideon se termina sur cette phrase. Il regarda la fraise de sa clope commencer à consumer le filtre entre ses doigts. Puis lorsque la légère odeur caractéristique de cramé arriva jusqu'à ses narines, il lança le mégot au loin d'une simple pichenette. La jeune femme avait fini la sienne un peu avant lui. Il roula donc à nouveau deux cigarettes et répéta le même manège que précédemment. Ils les allumèrent et l'esprit de Gideon recommença à vagabonder.

Hayaste – Oui, j’en connais.

Son regard se porta à nouveau sur la jeune femme. Allait-elle répondre ? Avait-il bien enchaîné ? L'organisation de ses phrases s'était faite au fur et à mesure qu'il les prononçait, et il n'était pas bien sûr du résultat que cela allait donner. Il se jeta tout de même à l'eau, conscient que ça pourrait être la première phrase d'une longue série, comme la dernière qu'il entendrait de sa bouche.

Gideon – Au fait, je m'appelle Gideon. Et toi la lionne, tu te prénommes comment ?

Hayaste - La lionne s’appelle Hayaste Enedwaith, murmura-t-elle sans ferveur. Mais pour quoi faire, l’Aristo ? Te souvenir de l’ouvrière muette que tu as battue sur le bitume ?

Alors que Gideon allait répondre à la question d'Hayaste, une petit voix fit son apparition en un creux de sa tête. « Elle t'as répondu andouille, RE-PON-DU. Arrêtes d'essayer de la convaincre et files chez Rodriguez avec elle. Maintenant, putain ! ».
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Kharlène Pynt
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MessageSujet: Re: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeMer 28 Mai - 10:06

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Hayaste Enedwaith

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MessageSujet: Re: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeJeu 29 Mai - 0:19

Alors que Gideon se perdait en mûres réflexions de l’ordre du maternel, de l’intempérie et du démoniaque, Hayaste s’efforçait de recouvrer un semblant de conscience. Sa respiration déréglée évoquait le chant novice d’un oiseau débutant. Elle s’en servit comme point d’ancrage, écouta chaque expiration avec une attention excessive. Chacune lui sembla plus étrangère que la précédente, son esprit ne faisait plus le lien avec son corps agonisant, dissociait ses pensées de leur enveloppe. En un sens, cette initiative était honorable. Elle put ainsi faire valoir son souffle haché à un effort trop grand. L’image d’une Hayaste effrayée, accompagnée par un Liam jeune, s’imposa à elle. Soudain, elle se figura courant dans la rue à toute allure, cherchant à échapper à quelque danger inventé qui les pourchasserait pour une raison inconnue. Peu à peu, sa cuisante défaite et l’affreuse douleur se réduisirent à néant, remplacées par un aspect heureux de sa vie imaginaire. Un faible sourire enjoliva même ses lèvres sèches. Elle écouta quelques temps ses inspirations, avant de se convaincre de la séparation âme et corps, et décida que l’instant était venu.

Hayaste, dans un effort surhumain, se redressa alors pour s’adosser au mur près duquel elle gisait. Elle ne brusqua pas sa jambe, mais ne ménagea aucunement son ventre. Le mouvement fut bref, lui arracha une ou deux grimaces, mais elle passa de la position allongée à assise, et cela constituait en soi un progrès non négligeable. Plus que deux kilomètres de marche, plusieurs minutes de transport, puis à nouveau un kilomètre de marche, et elle serait chez elle ! Là, elle… aviserait ? N’était-ce pas là le mot approprié ?
A vrai dire, il n’y avait rien à aviser, elle se ferait une attelle de bonne fortune, sa jambe se soignerait mal, mais un médecin serait hors de prix, et Ephron poursuivait ses études. Elle soupira, se maudit de son impulsivité, et regretta ne pas s’être cassé le bras à la place. Il aurait été plus aisé d’y remédier. La douleur en soi n’était pas un problème, elle était son quotidien. Mais celle-ci était particulière, indiquait qu’un os s’était brisé, ou du moins que quelque chose était trop endommagé pour qu’elle puisse utiliser sa jambe dans l’immédiat. Et cette impuissance l’irritait.

C’est seulement à cet instant qu’elle réalisa que l’Aristocrate, loin d’avoir pris congé, s’était assis près d’elle et se roulait une cigarette avec un flegme et un savoir-faire qui attisa sa rage envolée. Pourquoi ne pas l’avoir achevée, faire taire l’adolescente qui avait failli mettre son honneur en péril, et qui, quoi qu’il arrive, portait délibérément si peu de considération pour sa propre vie ? Ou plus simplement, pourquoi ne pas avoir repris la route, et oublié l’incident ? Il en sortirait salement amoché, mais serait remis en quelques jours. Rester était une option qu’elle n’avait envisagée, qu’elle ne comprenait pas, qu’elle avait repoussé d’entrée de jeu. Elle aurait même parié qu’il s’était éloigné sans demander son reste. Demeurer près d’elle afin de fumer sa « clope de la victoire et du réconfort » relevait de l’impertinence la plus extrême, et la plus misérable. Il lui sembla qu’il la narguait, et sa suffisance motiva suffisamment de hargne en elle pour qu’elle débute un nouveau combat. Et elle l’aurait initié, dans la mesure où ses membres avaient été fonctionnels.

Gideon – « … sacrés crocs … ton gabarit tu sais. Ils ont bien failli … me faire fermer ma grande gueule… les beaux-parleurs ont la peau dure ? »

L’œil morne, elle l’observa, se rendit compte qu’elle ne l’avait pas écouté, ou du moins que ses oreilles n’avaient pas tout perçu. Elle se sentit l’âme d’un homme soûl un lendemain de cuite. Une sorte de gueule de bois aggravée lui obstruait les sens, et sa tête tournait, virevoltait, enserrait son crâne dans un étau brûlant qui…

Gideon – « Trop tôt pour tenter une blague, j'ai saisi. Mais tiens, prends cette clope. Et c'est pas par charité, je suis pas ce genre de gars. C'est juste que je fume tout le temps tout seul, et c'est saoulant à la longue. »

Les mots ricochèrent sur son esprit, trop nombreux, trop insistants. Ses yeux semi-ouverts ne tendaient qu’à se fermer, son corps tout entier réclamait un sommeil bien mérité, mais les paroles du noble retenait son attention, bien que diffuses et incompréhensibles pour certaines. Il était indécent de s’endormir ici, se retrouver à la merci d’un aristocrate qu’elle venait de frapper sans retenue. Elle ne le connaissait pas, ne connaissait pas ses intentions. Sa personnalité était des plus obscures, et sa réaction la surprenait. Comment s’en remettre à un adversaire pareil ? Elle ne craignait que rarement pour sa vie, mais sa situation n’était pas des plus rassurantes.

Gideon – « Je vais pas te mordre. Prends-là ou je la jette dans cette putain de flaque d'eau. Grouille. »

L’empressement dans sa voix lui fit comprendre l’urgence de la situation. Mais en quoi celle-ci était urgente, elle l’ignorait. Tout fonctionnait au ralenti dans sa tête. Elle tendit le bras sans conviction pour prendre la cigarette qu’il lui tendait depuis trente secondes déjà, convaincue à présent qu’il la lui donnait, pour une raison qui lui échappait. Lorsqu’elle voulut s’en saisir, il se pencha un peu afin de limiter ses mouvements, et la perdition d’Hayaste fut totale. Où diable s’étaient envolés les propos acerbes, les phrases tranchantes, les insultes travaillées ? Il lui sembla que le cours du temps venait de changer de sens, que le monde lui-même s’était renversé, pour lui offrir une position des plus singulières.

Il lui fallut plusieurs secondes avant de s’emparer du briquet qu’il lui tendait, son esprit endormi s’en était allé derechef au pays des rêves et des souvenirs réjouissants, loin de la cruelle réalité et de la poignante vérité. Son doigt glissa sur la roulette, l’effleura à peine. Elle ferma les yeux, reprit ses esprits. Lorsqu’elle les rouvrit, il lui sembla voir plus clair, être physiquement plus présente. Elle mit toute sa force dans son geste, parvint à allumer le briquet. Il s’éteignit avant d’atteindre la cigarette. Il s’éteignit, de même que ses espoirs autrefois s’étaient éteints. L’image lui donna la nausée, elle s’appliqua à rallumer la flamme afin de ne pas fondre en larmes. La chaleur qu’elle diffusa sécha probablement ses larmes, car nulle ne vint lorsqu’elle reposa sa tête contre le mur.
La jeune Altératrice se rappela vaguement s’être trouvée dans la même position, dix minutes plus tôt ? Vingt peut-être ? Une heure ? Entre les deux instants sa folie lui avait joué des mauvais tours, et de quelques hématomes, elle était passée à un état déplorable. Elle n’avait nullement épanché sa soif de violence, car tournée vers Gideon, elle avait pris un goût trop exécrable. Pauvre enfant, comme tu t’es perdue, lui souffla une voix qu’elle reconnut à grande peine.

Gideon – « Je suis peut-être un Aristo bavard, mais putain t'es une ouvrière bien muette. Sans vouloir t'offenser bien sûr. »

Hayaste – « Parce que je ne dis pas ce qui est inutile. Ça s’appelle ne pas être superficiel.  »

C’était absolument faux. Elle était maladivement bavarde. Mais le plus souvent avec les personnes qui avaient témoigné des gestes plus sympathiques et fraternels que deux coups de pied dans le ventre. Par ailleurs, les deux phrases n’étaient destinées qu’à blesser l’orgueil de son interlocuteur. Mais sa voix était un tantinet faible et quelque peu enrouée, sa crédibilité inexistante. Elle avait prononcé les mots sans animosité, sans douceur non plus, et le tout laissait une sensation de travail non achevé pour cause de fatigue. Elle n’aurait su déterminer si sa haine était assez visible pour qu’il s’en vexe. Si ce fut le cas, il ne se découragea pas pour si peu.
Pourtant, elle avait bien tenté de fermer les portes, dans un moyen de défense psychologique relatif et entièrement infantile. Soit le seul à portée de main (littéralement à portée de main) dans le désarroi profond dans lequel elle baignait. Si ses idées lui semblaient plus claires, plus vives, son corps protestait de plus en plus. Il lui fallait repousser le noble, attendre qu’il accepte de se détourner, pour ramper jusqu’à chez elle s’il le fallait. Cette idée était peu sage, mais relevait de l’unique solution qu’elle détenait. Et elle n’avait aucune envie que son adversaire, vainqueur du duel, n’assiste à son humiliation complète.

Contre toute attente, celui-ci relança la conversation. Une longue seconde, elle se demanda si les hallucinations la gagnaient. Elle regarda la cigarette avec une méfiance risible, la jeta plus loin sans la terminer. Elle posa sur lui un regard accusateur, qu’il interpréta mal. Son cerveau s’apprêtait à imploser de trop penser sans en avoir les ressources. La brume aveuglante la menaçait à nouveau, et elle ne voulait pas de cet état de pleine solitude. Or elle ne pouvait ni comprendre ni s’évanouir. Elle fit le choix d’une troisième voie.

Lentement, sa main se déplaça jusqu’à la poche de sa veste. Ses doigts entrèrent en contact avec les multiples sachets qui s’y trouvaient. Elle en défit un, au risque d’en perdre une partie au fond de son vêtement, et fit glisser quelques grammes dans sa paume. A cet instant, Gideon finit de rouler ses deux nouvelles cigarettes et se retourna vers elle. Son regard trouva le sien, et elle se sentit plus misérable que jamais. Malgré la violence du combat, il conservait une élégance propre aux personnes importantes. S’il souffrait, rien n’en témoignait, et ses vêtements soignés couvraient tout signe de mésaventure. Elle avait voulu atteindre, un tant soit peu, cette noblesse qu’elle détestait, mais rien ne signalait l’effort fourni dans la réalisation de ce projet. Elle désespéra intérieurement de tant d’injustice, de l’inutilité de ses actes. C’était la dernière fois qu’elle s’attaquait publiquement à un noble, se jura-t-elle, et la détresse se lut parfaitement dans ses yeux alors qu’elle prononçait cette silencieuse promesse.

Hayaste – « Oui, j’en connais. »

La réponse sortit de nulle part, peut-être en décalé par rapport à la question, plus faible encore que la réplique précédente. En effet, elle avait côtoyé et côtoyait des personnes possédées par des démons, et elle ne s’en vantait pas. Son timbre indiquait l’exténuation qui la submergeait, la surprise également et un peu de beaucoup d’autres émotions. Elle tira la première taffe par dépit, dans l’attente de son répit. Elle avait gardé la poudre au creux de sa main gauche, et avait craint qu’il ne remarque quelque chose lorsqu’elle allumerait la deuxième cigarette. Par chance, il n’osa pas trop la dévisager pendant qu’elle peinait à allumer une deuxième fois le maudit briquet. Elle garda sa main plaquée contre son ventre, à moitié pour sa blessure, à moitié pour dissimuler son trésor.

Gideon – « Au fait, je m'appelle Gideon. Et toi la lionne, tu te prénommes comment ?  »

Très intéressant, pensa-t-elle ironiquement. Mais une… lionne ?

Hayaste - « La lionne s’appelle Hayaste Enedwaith,  murmura-t-elle sans ferveur. Mais pour quoi faire, l’Aristo ? Te souvenir de l’ouvrière muette que tu as battue sur le bitume ?  »

Elle avait insisté sur son titre, délimitant clairement la frontière de leurs mondes respectifs. Il se montrait bien trop amical, et elle en aurait mis sa main à couper qu’il cherchait à acquérir sa loyauté, initier une relation malsaine ou requérir un service divers. Elle ne lui faisait pas confiance. Gideon détourna les yeux à sa réplique, et son corps entier cria victoire : après ce temps interminable d’attente, à espérer la drogue, se réjouir de ses bienfaits à venir, elle put enfin porter sa main jusqu’à son visage, et inspirer profondément. La libération viendrait à présent, ce n’était qu’une question de temps.

Gideon - « Putain mais t'es folle ou quoi ? Tu veux vraiment y rester ? C'est pas possible de se coltiner des boulets pareil. »

Il l’avait vue, s’était retourné à temps. Elle soupira d’exaspération. Sa seule satisfaction fut qu’il n’avait pu empêcher son geste. Bientôt, les effets se manifesteraient, mais pas assez tôt pour éviter une conversation ennuyante (il fallait dire qu’il était bavard et pour le moins démonstratif). Certes elle était folle, s’il ne l’avait remarqué jusqu’alors c’est qu’il n’était pas bon observateur. Mais la traiter de boulet ? Qu’avait-elle fait de si reprochable ? Elle tenta de placer toute la colère dont elle était capable dans la phrase suivante, mais elle ne parvint qu’à lui donner une intonation hésitante et innocente :

Hayaste - « Qu’est-ce que t’en as à foutre si j’y reste ? »

La surprise se peignit sur le visage de son interlocuteur, comme si une telle interrogation n’avait lieu d’être. Son étonnement visible la fit douter elle-même ; la jeune fille pesa à nouveau le pour et le contre, analysa le bien-fondé de sa vision des circonstances, mais revint à la même conclusion. Il avait montré son indifférence envers la basse société, et se préoccupait à présent de la prise ponctuelle d’un peu de drogue, la logique manquait à cet enchaînement d’évènements. Cet aspect soupe-au-lait de sa personnalité était donc résolument perturbant, quoiqu’évocateur d’une personne qu’elle fréquentait quotidiennement.

Gideon – « Euuuuh... disons que ça le ferait pas si je laissais une gamine crever dans une ruelle alors que je suis clairement responsable. C'est pas par rapport aux autres, c'est juste pour moi. Un putain d’égoïste cet Aristo’, n'est-ce pas ? (Contre toute attente, il lui fit un clin d’œil). Du coup si tu pouvais éviter ça m'arrangerait ! »



Hayaste – « Ça me regarde si j'ai envie de clamser ici et maintenant, répliqua-t-elle avec aigreur, ton égoïsme ne m'intéresse pas. J'attends simplement que tu dégages pour décider de mon avenir, pendant que tu poursuivras ta vie tranquille de Noble assisté se réfugiant dans la jupe de ses parents lorsque besoin est. »

Il partit d’un rire qui rendit Hayaste maussade. Elle ne doutait pas qu’il maîtrisait mieux qu’elle l’Art de l’insulte et la capacité à vexer autrui. Mais de là à provoquer un éclat de rire ? Elle se ferma hermétiquement à tout signal extérieur, surtout en provenance du dit Gideon. Après son accès d’hilarité, il reprit la parole, prenant la peine de préciser qu’elle l’avait en effet bien fait rire –puisqu’elle n’avait pu le constater de là où elle se trouvait.

Gideon – « Tu me fais bien rire. Et ça faisait longtemps tu peux me croire. Je ne répondrais pas à ta provocation car tu sais très bien quelle serait ma réponse. Par contre je vais te dire quelque chose. Ta carcasse est fracassée de partout, tu viens de t'enfiler beaucoup trop de dope pour rester consciente encore trente minutes et si tu tombes dans les vapes ici tu vas y rester. Maintenant je te propose de te filer un coup de main. Ça doit t'arracher le cul je comprends bien, mais je m'en fous. Alors il va falloir s'entendre un instant, tu ne crois pas ? »

La colère monta en elle, et elle se fit violence pour ne pas la laisser prendre le dessus. Elle ? Sympathiser avec un noble sous prétexte qu’elle s’apprêtait à mourir sur le pavé ? Plutôt mourir dans la seconde.

Hayaste – « Non, justement, je ne sais pas quelle serait ta réponse ; tu agis comme si je te connaissais depuis des années, me propose ton aide et des cigarettes, en échange de quoi, dis-moi ? TU viens de "fracasser ma carcasse", et maintenant tu désires "me filer un coup de main". Je préfère attendre Liam en atténuant la peine par la drogue que de faire confiance à un Aristo’ à l’humeur variable, ajouta-t-elle avec une assurance relative. »

Gideon – « JE ? Tu te fous de ma gueule gamine ? Tu m'agresses et me reproches de défendre ma putain de peau ? Je suis vraiment tombé sur une folle, je le savais. Mais bon, disons que quand j'ai quelque chose en tête il est difficile de me l'enlever. Alors on va attendre ton Liam ensemble, j'ai tout mon temps. C'est peut-être un Altérateur aussi et il m'achèvera mais, au moins, je serais allé au bout de ma putain de volonté. »

Il ajouta quelque chose dans sa barbe, et Hayaste ne lui demanda guère de le répéter plus fort. Elle était tombé sur le seul aristocrate qui lui tiendrait tête jusqu’au bout, et tant de "malchance" la sidérait. Elle avait une chance sur quinze mille de tomber sur un Noble qui voulut la sauver plutôt que de la faire exécuter, et elle avait pioché le ticket gagnant. Comment aurait-elle pu anticiper qu’il serait si volontaire à sa remise en pied ?

Hayaste – « Quel caractère... grommela-t-elle, et les deux mots sonnèrent faux à ses propres oreilles. »

Le temps s’écoula sans que ni l’un ni l’autre ne cède. Elle se sentit sombrer peu à peu, alors que la poudre se répandait dans son organisme, atteignait lentement ses facultés cognitives. Les secondes ralentissaient ; elle eut tout à coup la sensation que leur conversation avait la puérilité d’une dispute d’enfants de cinq ans, et comprit combien il lui était impossible de trouver un terrain d’entente avec une personne aussi têtue qu’elle. La principale barrière n’était pas leur différence de condition, mais leurs obstinations respectives. Elles ne faisaient définitivement pas bon ménage, et cela aurait donné à la scène un côté comique si elle ne l’avait pas placée dans une telle impasse.
Cependant, une dernière fois encore, elle tenta de le faire abandonner sa vision cavalière d’un Gideon sauvant son assaillante en le convaincant de s’en aller :

Hayaste – « Personne ne saura...,  fit-elle à mi-voix, si tu me laisses crever là. Il n'y avait aucun témoin. Va-t-en.  »

La jeune fille ferma les yeux. Ses muscles s’engourdissaient enfin. Attendre Liam ici, ou une aide quelconque d’une personne appréciée, devint soudain une idée excellente et parfaitement cohérente dans son esprit, bien que le prétexte avait été employé afin de le faire fuir. Elle qui ne lui accordait aucun espoir tantôt, se laissa séduire par cette pensée, glissant dans l’état second que lui procuraient ses produits. Tous les points positifs de sa situation lui apparurent, largement amplifiés, effaçant les ennuis qui la concernaient. La gravité de son sort lui parut minime quand la voix de l’extase commença sa mélodie.
La fatigue enivrée l’enlace tendrement, les yeux d’ambre se perdent dans un autre univers. Plus heureuse qu’affaiblie, Hayaste, ou son esprit, s’élance dans la nuit, …

Gideon – « Putain tu vas pas t'endormir hein ? »

S’endormir ? Hayaste revint à elle. Sa jambe, son ventre, son aristocrate dévoué… Tout était malheureusement bien en chair, et tous trois étaient bien abîmés.

Gideon – « Finies les paroles, discuter avec un macabé m'a jamais intéressé. Alors je t'emmène chez quelqu'un qui pourra te remettre sur pied. Enfin... Façon de parler. »

A cet instant, Gideon se leva, et elle lut dans son regard une inquiétude qui contrastait avec ses traits habituellement hautains, ainsi qu’avec sa tentative d’humour à laquelle elle ne sut réagir. Il se pencha vers elle et sans demander son aval, la poussa à se lever. Il avait pris le temps de la prévenir, mais la douleur la surprit pourtant. Elle se débattit un peu. Sa force était dérisoire, et elle ne pouvait résolument pas se permettre de le repousser. Il était son seul support, s’il se dérobait, elle tombait. Elle finit donc par s’appuyer sur son épaule, prenant garde à ne pas ne serait-ce qu’effleurer le sol de son pied gauche. Elle ne souhaitait pas gémir à nouveau comme un caniche capricieux, son prétendu courage ne conserverait plus aucun crédit. Sa tête brûlait avec moins d’ardeur, mais des images défilaient devant ses yeux, sans fil directeur aucun. Son regard glissait d’un point à un autre sans marquer le moindre changement d’émotion. Plus rien n’exista ; que les sensations de son corps, et les idées étranges qui siégeaient dans son esprit ; plus rien n’importa.

Délicate fraîcheur, sur sa peau a coulé. Affectueusement la torpeur s’est lovée dans ses bras. Les maux du temps présent sont aussi ceux de l’avenir, mais il n’est guère utile d’y réfléchir dans l’instant, lorsque la procrastination nous favorise. Puissent les joies qui parsèment une existence, illuminer sa vie, comme des étoiles farouches éclairant le sombre voile infini, allument sans trêves les ténèbres impénétrables. Ici-bas pourtant tout est noir, la lumière jamais ne perce l’obscurité. Dans ce cas à Hayaste d’être lumière dans l’ombre, de surmonter les épreuves, dépasser ses peurs, ses passions et ses rêves.

La drogue transforma son échec en un duel héroïque, perdu de justesse. Elle lui chuchota d’une voix rassurante, tout près de son oreille, que ce qui ne tue pas rend plus fort. Comme toujours, elle s’endurcirait de ses échecs. Il en avait toujours été ainsi. Tout n’allait pas si mal.

Hayaste - « Martyrise mon corps, l’Aristo’, jusqu’à ce que je ne sache plus marcher, mais mes objectifs me forceront toujours à avancer,  déclara-t-elle sans raison. »

Ses propos furent tout juste audibles, et étaient imprégnés d’une satisfaction enfantine face à une réussite personnelle, une fierté que l’on garde enfouie. Gideon, conforté par l’absence d’hostilité dans sa voix, en profita pour mener à bien son plan initial ; il se baissa, tout en la soutenant, et peina à la hisser sur son épaule. Il y parvint tant bien que mal, mais y parvint tout de même. Le combat n’avait guère été de tout repos pour lui, et elle avait été trop égocentrique et envieuse pour en prendre conscience. A présent, la Poudre de l’Altérateur avait pris le contrôle entier de son corps et lui insufflait d’autres pensées, probablement moins terre-à-terre.

En y réfléchissant, elle n’avait plus mal ; soit le contrecoup avait été violent sur le moment, soit sa drogue était plus bénéfique qu’elle ne le pensait. Vaguement, l’idée d’en relater les effets à Liam lui traversa l’esprit. Et s’ils l’employaient à des fins médicales ? La pensée disparut aussi vite qu’elle s’était montrée, elle n’eut plus qu’en tête les pavés qui défilaient sous elle, et la pression qu’il exerçait autour de ses jambes pour la maintenir en place. Ce fut le souffle un peu court qu’il pénétra enfin dans un bâtiment, après plusieurs minutes à la transporter comme un sac de pommes de terre sur l’épaule d’un ouvrier lambda. Ce tableau avait quelque chose d’étrange et de drôle à la fois.

Le temps d’une effroyable incertitude, elle crut qu’il la ramenait chez elle. Avachie sur son épaule, en piteux état, qu’allait lui faire subir son père ? Elle craignit même, elle dut se l’avouer, pour Gideon et son intégrité. Mais la pièce ne lui était guère familière, et la voix qui s’éleva entièrement étrangère. Elle eut un discret soupir de soulagement –soulagement qu’elle regretterait par la suite- en l’écoutant proférer ces mots :

Rodriguez - « Sieur Ravenhart, cela faisait bien une semaine que vous ne m’aviez pas visité ! ironisa le médecin. »

La suite fut confuse. Le médecin s’enquit de l’état de la fille de joie, ou jeune fille -elle confond à ce jour les deux termes et ne saurait déterminer lequel il utilisa réellement- qu’il lui ramenait. Pour une fois qu’il n’était pas le patient, il se permit d’avouer sa surprise avant même de s’intéresser à son prochain objet d’étude. Il entraîna Gideon jusqu’à la pièce adjacente, où il lui fit signe d’allonger son fardeau sur la table. Il l’assista avec la délicatesse de celui qui ne sait pas de quoi souffre le client. Son premier réflexe fut d’entrouvrir les paupières de sa patiente, et ses sourcils froncés alors qu’il examinait l’intérieur de ses pupilles indiquèrent que la recherche fut fructueuse.
Hayaste se mit à s’agiter sur la table, laissa échapper deux jurons inaudibles ; la lumière trop vive transperçait son iris sensible. Elle ne se détendit à nouveau que lorsqu’il l’autorisa à refermer son œil et s’écarta d’elle.


Rodriguez - « Elle est camée en plus ? questionna-t-il sans vraiment attendre de réponse. Bon, bon… relativisons ! Elle sera plus facile à ausculter ! »

Il parlait avec la résolution de l’homme d’expérience, qui a vu des choses sanglantes et terribles, et que l’état d’Hayaste n’effrayait qu’à peine. Il posa des questions diverses à Gideon afin d’en apprendre davantage sur les parties à soigner. Alors qu’il lui prêtait une oreille attentive, ses mains d’expert palpaient les endroits concernés. Hayaste protestait comme un animal paniqué. Très vite, elle se mit à trembler. Après s’être trouvé à la merci d’un aristocrate, elle se trouvait à la merci d’un médecin. Son pire cauchemar eût été plus doux !
Gideon avait osé l’y amener et à présent elle ne pouvait plus y échapper. La vraie torture commençait.

Rodriguez – « Plus facile à ausculter, répéta-t-il avec un air distrait remettant complètement en cause la véracité de son assertion. C’est une Enedwaith non ? Ce n’est pas la première fois que je dois m’occuper d’elle, la dernière fois sa grande sœur me l’avait laissée agonisante. Faut croire qu’elle a l’esprit prompt à l’affrontement ?  »

Cette nouvelle semblait le désespérer plus que le rassurer. L’agitation de la jeune fille lorsqu’il avait ouvert son œil n’était qu’un avant-goût de son potentiel. Il avait trouvé particulièrement difficile de prendre soin d’une enfant paranoïaque et craignant qu’il n’emploie une seringue ou tout autre instrument sur elle. Il ne s’expliquait cette angoisse que par des traumatismes passés, mais cela ne rendait en rien son travail plus évident.
D’après les dires de Gideon, il lui faudrait traiter son abdomen (où se trouvait une ecchymose récente recouvrant une deuxième, vieille de plusieurs heures), s’assurer que sa jambe s’était bel et bien brisée, apporter les soins en conséquence, s’assurer que le reste du corps était opérationnel… La dernière option restait facultative étant donné la difficulté des précédents objectifs. S’ils en venaient à bout, ils pouvaient s’estimer heureux.


Dernière édition par Hayaste Enedwaith le Sam 7 Juin - 11:02, édité 4 fois
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Kharlène Pynt
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MessageSujet: Re: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeJeu 29 Mai - 10:57

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MessageSujet: Re: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeVen 6 Juin - 20:32

Elle était plus lourde qu'il ne l'avait tout d'abord pensé. Ou plutôt, il était plus amoché qu'il ne l'avait escompter. Gideon portait difficilement la jeune femme sur son épaule. Son corps entier lui faisait souffrir le martyr. Chaque pas attaquaient immanquablement les muscles de ses jambes et la douleur se répercutait dans son ventre meurtri. Il l'avait posé sur son épaule gauche, et il sentait à chaque pas le roulement douloureux des articulations de son épaule sous le poids de la femme qu'il portait. De plus son bras droit en avait pris un coup. Il ne s'était pas remis de sa dernière « tournée des bars » et il avait du combattre avec ce bras. Tout cela cumulé, sa démarche ressemblait plus à un vieillard que la vie n'a pas épargnée qu'à celle d'un aristocrate jeune et fringuant. Sa fierté aussi avait été durement atteinte par le combat. Il avait du mal à s'avouer à lui-même qu'une gamine pas très grande avait failli le vaincre en combat singulier. Il se dit à lui-même qu'il n'était pas un Aristocrate pour rien, il avait voulu enfoncer sous terre cette femme qui l'avait blessé et maintenant il voulait la sauver pour lui soutirer des informations. Oui il en était bien un, il pouvait retourner sa veste en un clin d’œil, du moment que ça allait en son sens. Cette pensée lui arracha un sourire jaune. Il avait depuis toujours eu ce second fardeau sur les épaules.

Mais ses pensées revinrent rapidement au premier fardeau qu'il portait en ce moment. Elle connaissait d'autres Altérateurs. Il fallait qu'il les rencontre. Gideon n'avait jamais eu l'occasion de parler avec d'autres détenteurs de cette magie. Il était trop honteux de ce pouvoir. C'était pour lui une tare plus qu'un don. Alors il avait caché ses capacités, ne les utilisant que dans des bars remplis de gueux. Il savait alors qu'ils ne diraient rien après lui avoir démonté la gueule. Ils n'étaient peut-être pas éduqués comme lui, mais ils n'étaient pas cons. Penser à l'Altération conduisit ses pensées vers sa mère. Sa tendre, et décédée mère. Était-ce la fatigue qui l'amena à revoir la scène ? Ou alors la douleur ? Ou bien un cocktail pas très subtil des deux ? Il ne savait pas et il s'en foutait, il revoyait cette scène dans sa tête comme un cauchemars, et c'était déjà trop pour lui. Il s'appuya contre une caisse dans la ruelle, laissant la vision d'horreur le prendre tout entier.

Emily – Gideon ! Vas-tu te calmer oui !

Gideon – Excusez moi Mère. Mais je suis si excité par votre cadeau !

Emily – Est-ce une raison pour te comporter de la sorte dans le train aérien ?

Gideon – Non... Vous avez raison.

Alors que Gideon répondait, il apparut sur le visage d'Emily un sourire d'amour. L'amour que porte une mère à son fils, indéniablement remplie d'attention et de fierté.

Emily – Allons ne fais pas cette tête. Viens dans mes bras petit garnement !

Alors que Gideon venait de baisser la tête, honteux d'avoir remué comme un sauvage, il leva la tête vers sa mère, arborant un sourire à pleines dents. Il s'assit alors à côté de sa mère pour la prendre dans ses bras. Gideon avait bien grandi ces dernière années, et il n'était pas aussi grand que sa mère, mais il poussait à une vitesse folle. Malgré cela, elle continuait de l'appeler « mon petit », comme seul les mères savent le faire quand il s'agit de leur enfant.

Emily, quant à elle, avait le visage fatigué. Des cernes avaient pris place en dessous de ses yeux, refusant de partir depuis maintenant des semaines, voir des mois. Elle avait maigri et sa force s'étiolait petit à petit, comme si elle était un récipient percé. Elle conservait tout de même sa chevelure magnifique à couleur d'ébène, une cascade rayonnante qui lui coulait de la tête jusqu'aux fesses. Et lorsqu'elle était avec son fils, elle n'abandonnait jamais son sourire si réconfortant et contagieux.

Emily – Ah ; nous sommes arrivés. Dépêches-toi Gideon, ton père doit encore se faire du mauvais sang, nous sommes à nouveau en retard.

Gideon – Il n'a pas à s'inquiéter autant ! Après tout je suis venu te chercher !

Emily – Oui mais tu connais ton père, il s'inquiète pour un rien. Et à chaque fois que tu viens me chercher, nous sommes en retard. Mais nous avons une bonne excuse cette fois-ci, il ne pourra rien dire !

Emily lui fit un clin d’œil plein d'entrain.

Gideon – Merci encore Mère, ce cadeau est magnifique. Je vais en prendre grand soin !

Emily – J'espère bien petit garnement !

Emily rit comme l'Aristocrate qu'elle était, d'un petit rire camouflé derrière ses mains. Puis elle toussa plusieurs fois, d'une toux grasse au son inquiétant. Le visage heureux de Gideon en voyant sa mère rire changea du tout au tout. Comme à chaque fois qu'il remarquait qu'elle faiblissait.

Gideon – Mère ?.. Vous allez bien Mère ?

Emily prit une inspiration après avoir finit de tousser, puis son sourire vint se ficher à nouveau sur son visage.

Emily – Oui Gideon, ne t'inquiètes pas. Je suis plus solide que j'en ai l'air !

Elle afficha son plus beau sourire, espérant que cela suffirait à convaincre son fils.

Gideon – Je sais que vous êtes solide Mère. Mais cela fait trop longtemps que vous êtes fatiguée de la sorte.

Emily – Ça va aller. Tant que ton Père et toi êtes à mes côtés, il ne peut rien m'arriver de grave.

Gideon avait le regard dans le vide, il n'entendit qu'à moitié la réponse de sa mère.

Gideon – Je sais ! Je vais prendre soin de ce revolver que vous m'avez offert comme un orfèvre s'occupe de ses pierres précieuses. Et plus le revolver sera magnifique, mieux vous irez ! D'accord Mère ?

Emily – D'accord Gideon. Ce revolver, tu vas le chérir comme si c'était moi. Il sera toujours avec toi, qu'importe le lieu ou le moment. Et je serais ainsi tout le temps auprès de toi, te protégeant de mon regard d'acier.

Elle fit une moue comique, imitant un regard plein de sérieux. Gideon sourit, autant à la réponse de sa mère qu'à sa moue rigolote.

Gideon – Ça me va Mère, j'en prendrais tellement soin qu'il ne vous arrivera jamais rien de négatif !

Emily – Merci mon fils. Merci Gideon.

Elle lui fit un signe de main pour qu'il se rapproche, puis déposa un baiser sur son front.

Emily – Aller il faut se dépêcher ! Tu es jeune toi, non ? Alors cours prévenir ton Père que j'arrive.

Gideon partit en courant, un grand sourire aux lèvres. Il ne vit pas la larme qui coulait sur la joue creusée de sa Mère.

Gideon – PERE ! MERE ARRIVE, VENEZ L'ACCUEILLLIR !

Gideon avait crié une fois les grande porte en bois à peine entre-ouvertes. Sans s'apercevoir que son Père était en fait dans l'entrée, en train de faire les cents pas.

Lunt – Arrêtes donc de crier ! Tu veux me rendre sourd ?

Gideon – Ah ; excusez moi père, je ne savais pas que vous étiez ici.

Lunt – Ce n'est pas grave, tu ne pouvais pas t'en douter... Allons chercher ta Mère.

Lunt dépassa Gideon et lui tapa l'épaule d'une main amicale. Il se rendait compte que son fils ne comprenait pas la situation, ou alors qu'il ne l'acceptait pas et fermait obstinément les yeux. Lunt se rongeait le sang tous les jours, du départ de sa femme pour aller au laboratoire jusqu'à son retour. Il était épuisé lui aussi. Des cernes encore plus massives que celles de sa femme avaient élu domicile sous ses yeux tirés par la fatigue. L’inquiétude est une maladie bien dangereuse se disait-il lorsqu'il se voyait dans un miroir.

Gideon resta aux portes de l'immense demeure, regardant son Père aller rejoindre sa Mère. Ils s'embrassèrent follement puis vinrent rejoindre leur fils.

Lunt – Je vais aller travailler. Gideon, je compte sur toi pour t'occuper de ta Mère.

Gideon – Ne vous inquiétez pas Père, je veille très bien sur Mère quand vous n'êtes pas là.

Emily – Oui ne t'inquiètes pas mon amour, tu sais combien on s'entend bien tous les deux.

Lunt – Oui je le sais. Mais un homme averti en vaut deux.

Emily – Tu ne changeras jamais Lunt.

Elle dit cette phrase les yeux remplis d'amour pour son mari. Puis l'embrassa une nouvelle fois.

Lunt – A demain.

Lunt partit alors, non sans s'être retourné une dernière fois au coin de la rue afin de faire un signe de main à sa famille.

Emily partit s'asseoir dans le salon. Et Gideon lui apporta une tisane aux champignons.

Gideon – Je vais faire à manger Mère. Reposez-vous.

Emily – Merci Gideon.

Elle effleura le bras de son fils avec douceur avant de porter la tasse finement ouvragée à ses lèvres. Puis Gideon partit dans la cuisine.

La famille Ravenhart était une des rares familles d'aristocrates à ne pas avoir de domestiques. C'était un principe de son Père qui avait conduit à cela. Pour l'homme qui s'était hissé dans la société à force de travail, il fallait faire les choses par soit-même. Sinon on ne pouvait en être fier.

Alors que Gideon finissait de préparer le dîner, il entendit sa mère crier. Il accourut aussi vite qu'il pu. Il courut comme un dératé de la cuisine au salon. Sa mère était affalé par terre, la tasse gisait à un pas d'elle, brisée au sol.

Gideon – MERE !

Gideon s'approcha d'elle et la souleva pour la mettre sur le canapé.

Gideon – Mère... Qu'avez-vous ?

Elle était livide, et ses yeux étaient révulsés. Gideon aurait pu la comparer à un cadavre s'il en avait déjà vu un.

Elle ne répondait pas à ses appels, et des convulsions s'étaient emparées de son corps. Il paniqua alors, la respiration haletante et les larmes aux yeux. Il alla chercher un tissu mouillé pour le mettre sur le front de sa Mère et il appela son Père pour lui dire de vite revenir. Il appela ensuite le docteur de la famille.

Puis il resta à côté de sa mère, assit par terre et lui tenant fermement la main.

Gideon – Mère... Répondez-moi... Mère...

Son état ne se calmait pas. Il regardait, impuissant, sa mère souffrir le martyr. Ses mouvements étaient moins saccadés, mais ses yeux n'étaient pas revenus à la normale. Et son teint était toujours aussi blême. Gideon pleurait maintenant à chaudes larmes. Il ne savait pas quoi faire, et son impuissance le taraudait, le rongeait de l'intérieur.

Puis vint le moment où les mouvements de sa Mère se stoppèrent. D'un coup, comme si quelqu'un lui avait ordonner de ne plus bouger.

Gideon – Mère ?...

Il avait prononcé ces mots dans l'espoir qu'elle se soit calmé, que l'étrange phénomène était terminé et qu'elle allait enfin être consciente. Mais c'est alors que la main que tenait Gideon perdit sa tonicité. Les muscles s'étaient relâchés en un instant. Le corps entier de sa Mère s'était relâché, affaissé. Le visage de sa Mère paru un instant plus serein à Gideon, et il serra plus fort la maigre main de sa génitrice.

Puis vint le moment où il comprit, où l'affreuse vérité s'afficha sans compassion devant les yeux mouillés du garçon. Elle n'était plus, elle était partie. Loin, très loin, dans un endroit où il ne pourrait jamais la revoir. Alors le corps de Gideon s'affaissa à son tour. Sa tête tomba auprès du corps immobile de sa Mère. Et il pleura de plus belle, laissant sa tristesse s'exprimer pleinement.

Gideon – Non, non, non... Non, non, non...

Il ne pouvait pas prononcer d'autres mots que ceux-là. C'était un cauchemars, il allait se réveiller et faire un câlin à sa mère qu'il aimait tant. Mais il n'arrivait pas à s'en persuader. La froide main qu'il tenait lui rappelait que ce n'était pas un cauchemars. C'était l'ancre qui le ramenait à la réalité. Mais il ne pouvait pas la lâcher. C'était pour lui inconcevable. Dans son esprit perturbé par la perte soudaine de sa mère, il se persuadait que c'était réciproque. Si cette main était son ancre, alors elle l'était aussi pour sa Mère. S'il la lâchait, elle partirait à jamais. Il serra cette petite main si fort que ses phalanges devinrent blanches, aussi blanches que la peau de sa Mère. Après plusieurs minutes passées ainsi, le désespoir s'empara de lui. Lourde chape de plomb, elle vint lui écraser les épaules. Il se laissa alors tomber sur le sol. Les yeux fermés, et il espéra rejoindre sa Mère. Il ne voulait pas la laisser partir. Et si elle partait, alors il la suivrait, peut importe les conséquences. Cette idée s'empara tout entier de son cerveau abîmé par ces événements.

Dans une motivation mortuaire, il se leva alors, laissant sa mère sur le canapé. Il se dirigea vers sa chambre. Et il ferma la porte à clef derrière lui. Puis il sortit de sa veste le revolver que sa Mère venait de lui offrir. Il sortit aussi la boite de cartouches. Il la posa sur son bureau, ouverte. Il observa le revolver d'un regard intense. La crosse était finement travaillée. Un lion était gravé dessus. Et juste en dessous était inscrit « LionHeart ». Il vit le lion rugir dans son esprit. Et la scène qui lui apparut était aussi morbide que son présent. Le lion hurlait, une lionne morte à ses pieds. Il retourna alors le revolver et regarda la bouche de celui-ci un long moment. Le revolver ainsi pointé sur lui, il pleura de nouveau, mais sans que son visage n'exprime quoi que ce soit. Puis il ouvrit le barillet, lentement. Il le fit tourner quelques fois sur lui-même. Ses doigts se dirigèrent ensuite vers la boite contenant les balles. Il en prit une, qu'il fit rouler entre ses doigts tremblants. Puis il la chargea dans le revolver et referma le barillet d'un geste lent. Il prit alors l'arme bien en main. Il arma le chien et entendit le déclic annonciateur. Il monta le revolver à sa tempe. Son index caressait le pontet alors que ses pensées chaotiques volaient en tous sens. Le regard dans le vide, les larmes coulaient à présent par elles-même, voulant sûrement se sauver de l'acte amorcé. Puis son index vint se poser sur la détente.

C'est alors qu'il reçu son don, sa tare. Dernier présent de sa Mère trépassée, le démon vint faire son nid dans l'esprit au bord du gouffre de Gideon.

Le démon avait, quelques minutes auparavant, migré de sa mère vers ce nouvel hôte. Et le réveil brutal de cet intrus dans le corps de Gideon lui fit lâcher le revolver. La présence étrangère avait commencé à bouger à l'intérieur du jeune homme. Elle se répandait comme un venin dans toutes les cellules de son corps, les contaminant irrémédiablement une par une. Le processus était très douloureux. Gideon, après avoir lâché l'arme, était tombé à terre. Il était pris de convulsions impressionnantes. Et sa peau rougissait sous l'effet de l'effort que son corps produisait pour tenter de se protéger. Il luttait en vain contre cette agression interne. Il se démenait, réquisitionnant toutes les forces que possédait Gideon. La chaleur qui s'était emparé de Gideon était impressionnante. Aucune fièvre jusqu'alors répertoriée n'avait atteint ce point là. Gideon était convaincu que si on le touchait, la personne se brûlerait instantanément. Il était devenu braise. Une braise qui souffrait de brûler ainsi. Ses cris ne dépassaient pas la porte de ses lèvres. Il ouvrait et fermait la bouche comme un poisson privé de son élément aqueux sans pouvoir sortir un son.

Puis vint le moment où le démon prit sa place au sein de son crâne. Sa tête était enserrée dans un étau si puissant que Gideon pensait qu'elle allait éclater d'un moment à l'autre. La douleur était toute entière concentrée dans son cerveau. Gideon enfonçait ses ongles dans son crâne, comme s'il tentait de creuser jusqu'à la source de cette souffrance. Il se tapa même la tête contre le sol à plusieurs reprise, essayant en vain de faire sortir l'étranger de sa tête brûlante de douleur.

Puis vint le calme. Après la tempête horrible qui venait de s'emparer de Gideon, tout s'arrêta brusquement. Et il aurait pu croire que rien de tout cela ne s'était réellement passé, si la sueur ne parsemait pas son corps et si une douleur diffuse n'habitait pas encore son être. La fièvre n'avait elle non plus pas quitté le nouvel hôte. Et elle le faisait légèrement halluciné. Il vit sa mère sur le canapé, inerte. Puis il vit la bouche du revolver pointer son œil. Puis il vit le lion pleurer au dessus du corps de la lionne.

Recroquevillé sur lui même en position fœtale, il pleura à nouveau. Il était impuissant. Il venait de se faire violer en son propre corps par un démon qui avait tué sa mère. Il avait même empêché le jeune homme de se donner la mort. Comme s'il le contrôlait à présent, il avait pris ses aises et s'était confortablement installé en Gideon. Il pleura plus fort et attrapa le revolver pour le serrer au creux de ses bras.

Il délirait à présent sur le sol de sa chambre. Il voyageait dans sa tête vers un monde morbide aux couleurs amères.

À moitié conscient, il entendit à peine son Père frapper à sa porte. Une seule pensée se hissa au dessus de son délire : depuis quand était-il là ?

Son père frappa plus fort à la porte. Puis lorsqu'il en eu marre qu'il n'ai aucunes réponses, il la défonça d'un coup d'épaule puissant. Lunt vit alors son fils, en larme et transpirant, recroquevillé au milieu de sa chambre à même le sol. Lunt lui-même pleurait à chaudes larmes. Et cette vision lui fit l'effet d'un poignard dans le coeur. Il prit son fils dans ses bras et le déposa dans son lit, le recouvrant avec la couverture. Puis il quitta la chambre.

Gideon dormit très mal cette nuit là. Et il entendit par intermittence les cris que son père proféraient dans l'immense maison vide de sa femme.

Lunt – SALAUDS... TOUS BRÛLER... RATS DE LABORATOIRE DEMONIAQUES... FEMME... TESTS FOUS... UN JOUR... EMILY... CHERCHEURS ALIENES... TUERIE... VENGEANCE... AMOUR... QUI SONT LES VRAIS DEMONS... SALOPARDS... EXPERIENCES... ME MANQUES... ENFER... JAMAIS PARDONNES...


Alors que la vision se faisait de plus en plus tenue, Gideon revint à lui. Il était transpirant et il commençait à basculer sur le côté. Il se ressaisit rapidement. S'il tombait maintenant, il ne pourrait pas hisser à nouveau la jeune femme sur ses épaules, il était trop épuisé. Il se releva alors, après avoir essuyé les quelques larmes qui coulaient sur ses joues, et reprit sa marche forcée. Il y était bientôt. Le cabinet... Enfin la maison de Rodriguez n'était pas loin. Encore un effort et il pourrait alléger son corps du poids de la femme. Il serra alors les dents jusqu'à sa destination.

Rodriguez - Sieur Ravenhart, cela faisait bien une semaine que vous ne m’aviez pas visité ! ironisa le médecin.

Gideon – Ta gueule Rodriguez. Aides moi plutôt que d'ouvrir ta boîte à merde.

Rodriguez – Je vois que Sieur Ravenhart est toujours aussi charmant et en bonne santé. Fin bref, c'pas pour nos discussions qu'on s’entend bien hein ?

Alors que Rodriguez souriait à sa blague, Gideon le regarda d'un air totalement blasé. Lui qui appréciait d'habitude les joutes verbales avec Rodriguez, il ne se sentait pas du tout d'attaque pour un nouveau round. Rodriguez le vit et comprit alors bien vite. C'était un homme de la menuaille que Gideon respectait beaucoup, le seul même. Il avait gagné ce respect avec ses paroles et son esprit vif, en plus de posséder la capacité de réparer les gens mal en point.

Rodriguez – Tires pas cette tronche bordel ! J'suis pas un croque-mort ! Bon... Qu'est-ce que tu m'amènes là ? Une pute que t'as trop malmené ?

Gideon – Rodriguez putain...

Rodriguez – Ok, ok. Si on peut plus rigoler hein. Déposes là derrière.

Gideon déposa difficilement Hayaste sur la soit-disant table d'opération. Lorsque Rodriguez vit sa difficulté, il l'aida un peu, mais pas trop. Il commença ensuite à « l’ausculter ».

Rodriguez - Elle est camée en plus ? questionna-t-il sans vraiment attendre de réponse. Bon, bon… Relativisons ! Elle sera plus facile à ausculter !

Gideon s'assit sur une chaise non loin de la table, le souffle court. Il tentait de récupérer ses forces tant bien que mal.

Rodriguez – Qu'est-ce qu'elle a la petiote ?

Gideon – On s'est battu et...

Rodriguez – Ah la galanterie de Sieur Ravenhart !

Gideon – Putain mais tu vas me laisser finir parodie de médecin !

Rodriguez partit dans un rire franc, à gorge déployée.

Rodriguez – Dis donc t'es plutôt à cran mon vieux. Faut te calmer hein.

Puis il rigola de nouveau. Gideon attendit qu'il eut fini pour reprendre d'une faible voix. Il tentait de reprendre son souffle entre chaque phrase qu'il prononçait.

Gideon – Regarde son ventre et sa mâchoire. Et aussi sa jambe. Je crois qu'elle est cassée.

Rodriguez – T'y est pas allé de main morte mon aristo préféré !

Gideon - …

Rodriguez – Bon, trêve de parlote, j'vais m'occuper de ta dulcinée aux poings d'aciers.

Il commença alors à tâter d'une main experte les parties concernées. Ses mains avaient l'assurance du type expérimenté. Il ne s'attardait pas longtemps sur chaque endroit décris par Gideon. Hayaste se mit à remuer dès qu'il commença son inspection.

Rodriguez - Plus facile à ausculter, répéta-t-il avec un air distrait remettant complètement en cause la véracité de son assertion. C’est une Enedwaith non ? Ce n’est pas la première fois que je dois m’occuper d’elle, la dernière fois sa grande sœur me l’avait laissée agonisante. Faut croire qu’elle a l’esprit prompt à l’affrontement.

Gideon – Je n'en sais rien Rodriguez. C'est la première fois que l'on se croise. Si tu l'as déjà vu, tu en sais bien plus que moi.

Rodriguez – Oh tu sais, j'connais pas aussi bien sa fougue au combat que toi !

Gideon – Abruti...

Rodriguez – Abruti ? Elle t'a vraiment bien amoché... Il t'en faut toi pour qu'tu sortes une insulte aussi bidon.

Gideon – Tu préfères que je t’appelle rebut terminé à l'urine ?

Rodriguez – Ah là je retrouve le Gideon que je connais ! Mais bon venant d'un Aristo bien battit comme toi à moitié mort à cause d'une gamine, ça fait moins d'effet t'sais ?

Gideon – Tu feras un effort pour le prendre mal d'accord ?

Rodriguez – C'bien parce que c'est toi hein ! Je fais pas cette fleur à tout l'monde.

Gideon – Tu m'en diras tant... Clope ?

Rodiguez – Vous savez m'parler Sieur Ravenhart. Avec plaisir bordel !

Gideon aimait bien ce côté bourrin subtil chez Rodriguez. Il avait été le seul à lui répondre de la sorte. Et c'est ainsi qu'il avait noué une amitié. Une amitié dont la rencontre avait été blessures et argent, mais une amitié tout de même.

Gideon – Tu la connais bien alors ? Tu sais qu'elle est ?...

Rodriguez – Une Altératrice ? Ouaip m'sieur. Le corps est légèrement différent à la palpation. Et puis faut la voir quand elle est paniquée, elle s'emballe un peu on va dire.

Gideon – Putain tu ne m'as jamais dit que tu étais au courant pour moi ! Et que tu en connaissais d'autres ! Tu as fait tomber ton cerveau alors que tu te curais le nez ou quoi ?

Rodriguez – Et le secret professionnel alors ? Tu te torches le cul avec ?

Rodriguez rigola à nouveau de son rire entier et bruyant.

Rodriguez – Non j'déconne. Ça m'a jamais traversé l'esprit c'tout. Qu'est-ce que ça peut t'foutre d'ailleurs ?

Gideon – Je... Je n'ai jamais rencontré d'autres Altérateurs. Enfin plutôt je n'ai jamais discuté ni appris avec eux.

Rodriguez – Sieur Ravenhart est trop timide ? Oh le pauvre...

Il sourit à pleine dent, fier de la pique qu'il venait d'envoyer.

Gideon – Je ne pense pas que tes neurones seraient en mesure de comprendre toute l'histoire si je te l'expliquait. C'est pour te préserver de l'arrêt cérébral que je ne t'ai rien dit.

Rodriguez – Trop aimable !

Gideon – Trêve de conneries. Il faut que tu la remettes en état Rodriguez. Je compte sur toi, c'est important pour moi.

Rodriguez – Tant de sérieux, c'est déprimant d'ta part. Mais bon, c'que demande Sieur Ravenhart, Rodriguez le fait !

Gideon – Merci Rodriguez. Je te paierais bien, ne t'en fais pas.

Rodriguez – Ah mais je m'en fais pas ! C'est plutôt la petiote qui devrait s'en faire si tu paies pas bien hein.

Il rigola à nouveau, et si seulement Gideon n'était pas taraudé par des milliers de questions, il l'aurait suivi volontiers. Son esprit était en ébullition. Il voulait à tout prix qu'Hayaste se remette de ses blessures pour qu'enfin elle puisse répondre à ses pressantes questions.
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Hayaste Enedwaith

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MessageSujet: Re: Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]    Le Combat des Colombes [Avec Gideon Ravenhart]  I_icon_minitimeJeu 12 Juin - 17:43

Hayaste – « Fermez-la ! »

La jeune fille avait hurlé à pleins poumons, elle qui jusqu’alors demeurait silencieuse. Les voix des deux camarades l’empêchaient de sombrer, capter les effluves d’un rêve oublié. La drogue la transportait vers un monde de songes, et comme la discussion proche de plusieurs personnes vous empêche de vous souvenir entièrement du rêve que vous venez tout juste de quitter, Gideon et Rodriguez perturbaient sa concentration. Cela justifiait de toute évidence son manque de civilité.

Rodriguez – « J’crois bien qu’la sale gosse a besoin d’attention ! »

Rodriguez souriait un peu moins, mais ce changement n’était pas perceptible tant son humeur était naturellement enthousiaste. Il éjecta la fumée de ses poumons, déposa la fin de cigarette à même le bureau (qui n’était guère fait de bois, soyez tranquilles), puis s’approcha à nouveau de sa patiente en se frottant les mains. L’inspection était terminée, ses tâches à venir étaient claires comme de l’eau dans son esprit ; son intervention de charcutier commençait dès à présent !
Il leva un sourcil étonné tout d’abord, effleurant le bord de l’estafilade qui barrait la joue d’Hayaste, du bout des doigts seulement pour ne pas forcer sur la plaie. Son œil de lynx n’avait guère prêté attention à cette blessure dissimulée par la chevelure sombre de l’Altératrice.

Rodriguez - « Mais c’est qu’tu l’as carrément griffée, mon vieux ! De vraies furies, moi j’vous l’dis, j’aimerais pas être vos voisins ! »

Gideon – « Tu vas la fermer vieux vicieux, je suis pas là pour donner vie à tes fantasmes ! Fais ton boulot, pervers au rabais. »

Evidemment qu’il ne l’avait pas griffée, un ongle ne perce pas aussi profondément une peau humaine, à moins de porter le coup une bonne dizaine de fois –ce qui était peu plausible. Le médecin se dirigea vers ses innombrables tiroirs pour n’en ouvrir qu’un seul, et piocher, semblait-il au hasard, un pot. La réalité est qu’il connaissait si bien l’emplacement de chaque outil, chaque médicament, chaque élément -quel qu’il soit- de son attirail, que si l’on venait à les intervertir, il serait perdu.

Sur le bureau (où reposaient les instruments et biens les plus courants d’emploi), il attrapa une compresse, et désinfecta la plaie à l’alcool. Hayaste réagit au quart de tour au picotement insoutenable, et tenta de le frapper au ventre. Ses yeux, cependant, ne lui offrait qu’une vue trouble, ne lui permettant pas de viser correctement. De plus, ses tremblements incontrôlables l’empêchaient probablement d’y placer la force voulue. Résultat, le peu d’énergie qu’elle employa se dissipa dans l’air, et un Rodriguez inchangé maugréa à demi-mot contre les ravages de la drogue qui en rendaient certains givrés.

Rodriguez – « Eh, Sieur Ravenhart, rends-toi utile et tiens lui les bras. »

Gideon – « Tu peux pas l’attacher ? Je suis pas ton assistante à jupe courte. »

Des entraves en cuir et doublées pendaient en effet lamentablement vers le sol, solidement accrochées à la table d’opération, en attente d’être utilisées. Sans doute servaient-elles lorsque la précarité des moyens misérables du médecin ne suffisait plus aux patients. A défaut d’être équipé d’opium et d’anesthésiants, il restait toujours la restriction des mouvements. Après, on comptait sur la force d’esprit des patients !

Rodriguez – « Les entraves c’est pour les opérations délicates, et certainement pas pour une gamine d’un mètre cinquante qui tremble comme une feuille. T’as pas peur de la toucher quand même après que vous ne vous soyez pas gênés pour vous tabasser l’un l’autre ? Des chochottes, ces nobles ! »

Il avait un air moqueur qui poussa l’aristocrate à délaisser sa cigarette, et se diriger vers la table d’opération.

Gideon – « Chochotte ? Tu crierais comme une gonzesse si c’est moi qui te soignais. »

Le médecin sourit de bon cœur, lui accordant tout son crédit, pendant que de ses mains il joignait les poignets d’Hayaste. Celle-ci, parcourue de tremblements, se débattit sans vigueur. Mais une fois que Gideon les plaqua contre la couverture sur laquelle elle était étendue, elle ne résista pas à cette volonté qui s’imposait à elle. Elle comprit qu’elle était seule, affaiblie, contre deux, et qu’on la contraindrait à se soigner, à subir cette infâme épreuve de la guérison forcée. Elle ferma les yeux, voir lui faisait mal à la tête, et observer ses bourreaux ne lui apportait aucun soulagement. Elle appréhendait la seconde suivante comme si elle pouvait apporter la mort dans son sillage.

Les frissons qui la parcouraient redoublèrent, mais elle demeurait à présent inerte. Rodriguez parut visiblement soulagé de tant d’amabilité. Il plongea une main sûre dans le pot, pour la sortir couverte d’un onguent épais et à l’odeur bien caractéristique des pommades ; ni agréable, ni désagréable, simplement non souhaitée. Il l’appliqua en un unique aller-retour. Les tremblements partirent de plus belle, chaque membre de son être était plus tendu que les cordes d’une guitare à sa tête.

Hayaste – « Lâche-moi ! supplia-t-elle, d’un timbre qui suggérait son angoisse. »

Rodriguez – « Ne la lâche pas, répliqua-t-il sans forcer la voix. »

Le contrordre fut presque simultané, comme une réponse  automatiquement déclenchée par le ton impérial de la jeune fille, un algorithme réactif manipulé informatiquement.

Rodriguez – « Mais n’utilise pas toute ta force hein ? nuança-t-il aussitôt. Tu la tiens juste pour la rassurer et éviter qu’elle me mette dans le même état que toi ! »

Aux yeux du médecin, Hayaste avait une peur instinctive de l’inconnu et de l’impuissance. Et pour calmer un animal, il faut de la chaleur, une présence dite de référence, qui nous effraie moins que le reste. De la même façon, un chien court aux pieds de son maître s’il se sent en danger, même si le maître n’a guère conscience d’être figure suprême de la protection. En soi, l’idée d’établir un contact permanent avec les mains de Gideon n’était pas mauvaise, et la drogue commençait également à compléter cet objectif. Elle parvenait enfin à faire abstraction de leurs paroles pour voir des images colorées d’un univers monté de toute pièce. Partagée entre une vérité qui l’assaillait, une peur tordante et un monde insensé mais plaisant. Le pont entre les deux parties de son esprit, c’était le maigre réconfort du contact avec le Noble qu’elle détestait tant, celui qui cependant lui permettait de ne pas lâcher prise complètement pour se réfugier dans le bonheur d’un univers inventé.

Rodriguez – « Et maintenant, ne te rince pas trop l’œil ! murmura Rodriguez sur le ton de la confidence. »

Il découvrit l’abdomen de la jeune fille avec circonspection. Cette dernière quitta son rêve derechef pour tirer sur ses bras, mais Gideon réagit à temps pour la retenir. Tout son corps avait la consistance de la pierre, tant sa tension était élevée, mais détenait également la chaleur ardente du volcan en éruption. Aussi Rodriguez ne s’étendit-il pas en soins inutiles ; il appliqua une nouvelle solution sur ses ecchymoses. Il fallait compter sur son système immunitaire pour réparer les dommages internes, il n’y avait pas grand-chose à faire de l’extérieur.
Par ailleurs, il décida de ne pas vérifier à nouveau si un os était brisé ou non, et pour des raisons évidentes, mais également parce que l’évidence était là ; un os était cassé avec une probabilité de quatre-vingt-dix-neuf sur cent, probablement le tibia. Il n’y en avait pas tant que cela à cet endroit, et il connaissait par cœur les durées de rétablissement et les conséquences visibles. Il ferait au talent.

Rodriguez – « T’as mis combien de temps pour me la ramener ? demanda-t-il soudain, alors qu’il observait toujours les hématomes abdominaux d’un œil critique. »

Gideon – « Une bonne heure, elle voulait pas que je l’aide … »

Rodriguez – « Une heure ? Mais c’est que tu mens comme un arracheur de dents ! »

Gideon – « C’est moi qui vais t’arracher les dents si tu continues à me traiter de menteur mon brave ami. Et comme tu es un ami, je t’anesthésierai à coups de poing juste avant. »

Le médecin haussa les épaules, et se préoccupa plutôt de la prochaine blessure. Silencieusement, il remercia la mode de faire porter aux femmes les jupes, et aux hommes les pantalons. Hayaste aurait sans doute peu apprécié qu’on lui retire son falzar, la mission aurait été avortée dans l’œuf. Il n’eut donc qu’à retirer ses bottes avec précaution, centimètre par centimètre. Chaque mouvement était calculé, malgré tout l’Altératrice gémit, non de douleur mais de crainte. Ses mains devinrent rapidement moites.

Hayaste – « Je me soignerai plus tard, laissez-moi… »

La jeune fille avait marmonné la complainte, dont seuls quelques mots étaient audibles. Rodriguez poursuivit son entreprise toutefois, sans prendre en compte ses paroles. Il devait en venir à bout, ne serait-ce que pour son Aristocrate préféré qui l’observait à l’œuvre.
Le coup de pied partit sans prévenir (de son pied valide bien entendu), manqua la cible supposée d’un bon mètre. Le médecin lui-même sursauta, pourtant averti. Il leva les yeux au ciel avec amusement, et s’employa à nouveau à emplâtrer sa jambe.

Rodriguez – « Sérieusement, t’aurais mieux fait de trouver une Altératrice un peu moins vive. Elle va te filer du fil à retordre. »

Hayaste – « Je t’entends fils de chien, répartit-elle à mi-voix, mais non sans une certaine animosité. »

Rodriguez – « Tu vois de quoi je parle ! »

La suite se déroula sans incident. Hayaste tremblait toujours, mais elle avait abandonné l’idée de le frapper, car elle lui attirait plus de douleur que de satisfaction. Le travail achevé, Rodriguez poussa un soupir de soulagement et se dirigea vers  la salle d’eau adjacente, faisant signe à Gideon de le rejoindre. La jeune fille put à nouveau respirer pleinement, voguant entre un monde parallèle et la réalité. Elle avait survécu une nouvelle fois, peut-être commencerait-elle à faire confiance à ce médecin-là. Un jour ou l’autre.

Pendant ce temps, tout en se lavant les mains, le médecin dont il était question s’entretenait en ces mots :

Rodriguez – « La dernière fois sa sœur et elle se sont battues. Aujourd’hui, tu me la ramènes, et elle s’est battu avec toi. C’est pas le genre de filles auxquelles t’as envie de t’attacher, mon vieux. »

Gideon – « T’es pas psychologue que je sache, Rodriguez. Ou alors t'as trouvé du temps pour étudier entre deux amputations d'abrutis ? Joue pas les prophètes illuminés avec moi, tu le sais. »

Rodriguez – « Boarf, tu sais, si vous vous fréquentez, ça veut dire plus de blessés et plus d’argent, j’vais pas m’plaindre hein ! Mais fais-moi plaisir, demande-lui ce qu’il s’est passé avec sa sœur, j’ai toujours été curieux d’entendre cette histoire mais elle est muette comme une tombe la p’tiote ! »

Gideon – « C’est pas tes affaires, fumier cupide. »

Le médecin se contenta d’hausser les épaules, dans un geste qui mêlait lassitude et entrain. Il se rinça le visage, essuya ses bras tannés et abîmés comme ceux d’un ouvrier. Son expérience lui venait avant tout de son travail d’arrache-pied, et son corps en avait pâti à sa manière.

Ils quittèrent la salle de bain, pour retrouver leur farouche patiente. Le médecin d’âge mûr en avait vu de toutes les couleurs, et chaque jour pourtant une nouvelle nuance se distinguait des autres. Il voyait de virulents malades, de la gangrène à un stade ultime, des pathologies psychologiques plus que matérielles, des éraflures de tout type, et même quelques amputations, opérations et autres réjouissances. Mais de loin les Altérateurs étaient les plus singuliers de ses patients. Les blessures les plus graves les atteignaient moins que la normale, et leur pouvoir de guérison avait quelque chose de phénoménal.

Rodriguez – « Ça va mieux, jeune fille ? »

Son ton amical provoqua un éclair d’hostilité dans le regard sombre de l’Altératrice. Mais sa peur palpable d’être en ce lieu étouffa vite cette colère.

Hayaste – « Peut-être, quand il n’y aura plus de médecin ni de noble à un kilomètre alentour. »

Rodriguez- « J’y suis pour rien s’il t’a eue, moi ! Mais on t’a jamais appris faire profil bas devant un aristocrate ? »

Hayaste – « On m’a appris à ne pas leur faire confiance, et surtout à craindre les médecins. »

Rodriguez – « Je t’ai sauvé la vie deux fois figure-toi. »

Hayaste – « Ma sœur ne m’aurait jamais laissée mourir, vous vous recouvrez de trop de gloire. »

Hayaste jeta un coup d’œil vers Gideon alors qu’elle proférait ces propos antipathiques, leurs regards se croisèrent le temps d’un quart d’un septième de milliseconde. Ce fut assez pour que, gênée, elle détourne les yeux pour fixer le ventre bedonnant du médecin, auquel elle portait soudain un intérêt excessif. La drogue fut ravivée par quelque vision, ou le contraire, et elle partit d’un rire presque fou, toussa, reprit son accès d’hilarité, pour enfin descendre à bas de la table.

Des yeux elle refroidit toute envie de l’aider à marcher, mais ses pas hésitants ne la portèrent pas suffisamment loin. Là où la table s’arrêtait, elle n’avait plus d’appui et elle sentait chaque muscle se contracter et rouspéter d’être tant martyrisé ce jour-là. La douleur lancinante du ventre était, de surcroît, tout juste apaisée par la fraîcheur de la pommade. Rodriguez finit par céder à ses bonnes manières plutôt qu’à son instinct de survie, et il la soutint jusqu’à la salle d’eau, puisque c’était dans cette direction qu’elle s’en allait. Là, elle s’appuya contre le rebord, et après une minute à observer le blanc nacré du lavabo, elle restitua son dernier repas. Le médecin se mit à rire à son tour.

Rodriguez – « Mais quelle charmante trouvaille, Sieur Ravenhart ! Hé, n’est-elle pas mignonne ? »

Si elle avait été assez réactive, le médecin aurait pu voir le regard assassin qui se peignit sur son visage. Mais fort heureusement, il détourna les yeux trop vite d’elle pour n’en percevoir ne serait-ce que l’esquisse. De toute façon, aucune des émotions qu’elle ressentait n’était sienne. Il lui semblait les avoir volées à quelque autre être, peut-être le démon qui était en elle, qui sait ! La poudre de l’Altérateur, elle savait tout ce que l’homme pouvait savoir dessus, mais cela ne signifiait pas qu’elle ne recélait encore de multiples secrets.

Gideon – « Allez, le clown avorté, fais-moi payer qu’on règle cette histoire. T'encaisses ton fric, et tu te prépares pour notre prochaine rencontre. Je serai plus en forme qu'aujourd'hui alors je te dis pas comme tu vas en chier ! »

Il lui sembla avoir un nouveau moment de Néant, de blanc. La seconde suivante, elle était sur le trottoir, marchant avec difficulté, à moitié appuyée sur une canne, à moitié contre le mur. Les lois de la cohérence et de la logique refusaient l’idée qu’elle put se retrouver là une seconde après s’être trouvée dans la salle de bain. Plus surprenant encore, quelqu’un la suivait. Encore lui ?

Hayaste – « Tu comptes me suivre longtemps ? »

Gideon – « J’ai dit au doc’ que je te ramenais chez toi saine et sauve. »

Hayaste – « Quel chevalier-servant remarquable… »

Elle avait lancé la semi-insulte sans conviction, par formalité plus que par réel désir de le rejeter. Sa présence n’était pas un désavantage. Il avait prouvé qu’il la voulait vivante, et cela ne pouvait qu’être rassurant. De plus la matinée avait été éprouvante, et elle avait l’impression d’avoir passé des journées et des nuits entières sans fermer l’œil une seule fois. Souvent elle s’arrêtait, et Gideon, patient, l’attendait un pas plus loin, finissant une cigarette, ou en allumant une nouvelle.

Hayaste – « Qu’est-ce que tu veux de moi l’Aristo’ ? »

Gideon – « Rien qui ne soit hors de ta portée, la Roturière. Tu m’as dit que tu connaissais d’autres Altérateurs… »

Hayaste – « Oui. Elle est morte. »

L’expression du noble se décomposa un peu. Tout d’un coup elle se sentit cruelle de lui vouloir tant de mal, elle eut pitié qu’il soit noble, albatros aux ailes trop grandes enfermés dans une cage dorée qui n’était pas à sa mesure. Elle se plaignait de n’avoir de liberté de mouvement et de pensée, mais du moins on n’attendait rien d’elle, personne ne plaçait en elle des espérances diverses qui furent à décevoir.

Hayaste – « Bon d’accord, j’en connais deux autres. Le frère de Liam, celui dont je parlais plus tôt. Et mon propre frère. »

Elle avait fait ces révélations d’un ton égal, comme si cela ne la touchait pas personnellement. Mais son regard avait trahi son trouble, et son anxiété était réel. Elle inspira, et dans un effort surhumain de socialisation, elle posa la première question qui lui traversa l’esprit.

Hayaste – « Depuis quand tu l’es, … Ravenhart ? »
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